Penser ce que nous ne pouvons pas nous représenter

En 2002, Daniel Giovannangeli esquissait, en une série de leçons magistrales, une histoire de l’usage philosophique du concept de représentation — de Platon à Levinas. Dans ce large panorama, la place centrale revenait à  Kant. Selon la lecture de Giovannangeli, Kant, tout en actant la fin de  l’époque classique d’une représentation sans sujet, est aussi celui qui  s’oppose le plus délibérément à l’inscription de la nouvelle représentation  subjective dans le cadre d’une métaphysique de l’infini. Avec sa philosophie critique d’une subjectivité finie, il prend ses distances vis-à-vis de Descartes et il devient en même temps une source majeure d’inspiration pour tous ceux qui se détournent de la version hégélienne d’une subjectivité absolue. Dans la phénoménologie, ce qui reste d’une représentation subjective finie trouve un nouveau fondement dans l’intentionnalité de la conscience ou l’être-au-monde d’une ek-sistence mortelle. La  question d’un infini de la représentation ne disparait pas pour autant, mais elle se déplace du sujet vers l’objet, de la Vorstellung vers la chose, et de la chose même vers la profondeur  inépuisable de son horizon explicite et implicite.

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