Neurosciences et éthique: que nous apprend le dilemme du wagon fou?
L’éthique normative contemporaine est marquée par un débat entre deux positions antagonistes, le déontologisme et l’utilitarisme. Ce débat est resté jusqu’à récemmentun débat usant d’arguments, d’objections, de contre-exemples et d’expériences de pensée essentiellement conceptuels. Il y a peu cependant, dans la foulée des progrès del’imagerie cérébrale, Joshua Greene y a introduit des éléments empiriques : proposant à des sujets différents dilemmes, dont le dilemme du wagon fou (trolley problem), il a examiné comment leur cerveau réagissait. Il en a tiré la conclusion que le déontologisme s’appuyait sur des réponses émotionnelles, alors que l’utilitarisme utilisait des circuits rationnels, ce qui assurait à ce dernier une meilleure pertinence morale. Les raisons déontologistes seraient même des rationalisations a posteriori, voire des confabulations.Malheureusement, si le recours à des données empiriques est un progrès philosophique dans l’examen de ces questions, les conséquences que Greene en tire ne sont à mon sens pas probantes.