L’irréversibilité du temps, apparence ou réalité en physique ?
L’objet de cette réflexion n’est pas au départ épistémologique ni scientifique ; il est philosophique et concerne simplement l’énigme du temps. Qu’est-ce donc que le temps ? La question « qu’est-ce… ? » à propos du temps est certes contestable, puisque, comme le dit saint Augustin, « le mode d’être du temps est de ne pas être ». Heidegger situe d’ailleurs son questionnement des rapports entre L’Etre et le temps et Le temps et l’Etre, dans le sillage tracé par Augustin.
Mais le questionnement que je vous soumets est beaucoup plus modeste. Nous ne nous risquons pas ainsi à devoir interroger l’ensemble de la tradition philosophique. Nous limiterons volontairement notre champ d’investigation en prenant au sérieux une interrogation de physicien : le temps est-il une apparence ou une réalité ? On peut toujours reprocher à cette question sa naïveté sous prétexte qu’on ne saurait faire du temps une « réalité » comme si le temps était un « étant » parmi d’autres.
Prenons-la au sérieux cependant ; nous verrons qu’il y a beaucoup à penser à partir de cette question. Non que la science puisse me donner une réponse à la question de ce qu’est le temps. Mais les questions que pose et que se pose le savant ont de quoi nourrir et stimuler la réflexion philosophique. Ce sera pour nous l’occasion de montrer que pour faire de la bonne philosophie il faut parfois rencontrer la science et prendre part à ses questionnements et à ses discussions. Et qu’inversement pour faire de la bonne science il faut faire parfois aussi de la philosophie. Le chercheur en effet dans ses préoccupations de chercheur, pour un peu qu’il interroge les concepts qu’il met en place et les hypothèses qu’il tente d’expérimenter, rencontre la philosophie – tantôt sans le savoir lui-même, tantôt tout à fait consciemment.