Descartes, Principes, livre II. Le mouvement
Introduction
La métaphysique donne les racines d’où surgit le tronc de la physique. C’est vraiment le cas pour Descartes. Il faut jouer ce jeu avec lui pour le comprendre. Dieu existe. Dieu donne ses lois à la nature. Dieu crée, il re-crée continuellement (la création est continuée). Et ainsi, en droit, la physique peut découler de la théologie. Dieu étant parfait, comment cela se traduit-il dans la nature ? Selon la raison, sans nul doute ; selon la méthode, encore : Dieu lui-même part des choses les plus simples et les plus aisées à régler. Quelles sont-elles ? Il y a l’étendue en longueur largeur et profondeur, qui est partout matérielle, pleine, homogène et uniforme, – le vide n’existe pas. De plus il y a le mouvement, le mouvement qui est juste un transport d’un corps d’ici à là, le mouvement lui-même tout simple et un. La géométrie parle parfaitement de l’étendue corporelle, et elle répond du mouvement. Ainsi Dieu conserve l’étendue et le mouvement, il les maintient dans l’existence. Et comme l’étendue demeure, de même la quantité de mouvement demeure, elle est invariable, elle n’augmente pas, elle ne diminue pas. Le monde est étendue et mouvement : c’est tout.
Tout se passe comme si le mouvement découpait des corps au sein de l’étendue pleine, de sa masse homogène : parce qu’il y a du mouvement, il y a des planètes, des étoiles, des comètes, etc., à savoir des volumes de matière, dans le monde.
De plus, cela tourne, cela tourbillonne.
« Tous les mouvements qui se font au monde sont en quelque façon circulaires : c’est-à-dire que, quand un corps quitte sa place, il entre toujours en celle d’un autre, et celui-ci en celle d’un autre, et ainsi de suite jusqu’au dernier, qui occupe au même instant le lieu délaissé par le premier. En sorte qu’il ne se trouve pas davantage de vide parmi eux, lorsqu’ils se remuent, que lorsqu’ils sont arrêtés. » (Descartes, Le monde ou Traité de la Lumière, XI, p. 19).
Les corps se transportent, occupant des lieux successifs : eux aussi ils demeurent, comme s’ils tournaient dans un espace naturellement courbe .
Nous avons les trois postulats : étendue, mouvement, circularité.
L’exposé de la physique dans le Monde ou Traité de la lumière fut rédigé le premier, il fut rédigé plus souplement et littérairement que les Principes, où l’exposé, étant fait sous forme d’articles, est plus contraint, plus raide. Aussi, pour nous y apprivoiser, en prendre connaissance et comprendre, passons d’abord par Le Monde.