De la phénoménologie à la métaphysique. Impression originaire et flux. La relativisation du temps chez Michel Henry
Phénoménologie matérielle est un texte pivot dans l’itinéraire de pensée de Henry. Ce livre reprend l’ensemble des acquis conceptuels que ses ouvrages précédents de philosophie fondamentale avaient établis. On retrouve en effet les thèmes porteurs de la pensée henryenne : la critique de la pensée philosophique traditionnelle fondée sur le primat de l’ek-statique, la caractérisation de la vie comme auto-affection, l’identité de soi à soi dans le sentir originaire, etc.
Par ailleurs Phénoménologie matérielle prolonge l’attitude critique qui apparaissait déjà dans L’essence de la manifestation et qui a été méthodiquement adoptée dans Généalogie de la psychanalyse. Dans ce livre, Henry établit une lecture des grands jalons de la pensée moderne et contemporaine (de Descartes jusqu’à Freud) afin de montrer comment l’immanence de la vie est à la fois opérante et oubliée. La pensée pressent la pure intériorité affective et non ek-statique de la subjectivité originaire, mais l’oublie tout autant et dans le même geste car elle demeure animée par le modèle de pensée prégnant depuis les Grecs, qui met en place la primauté de l’extériorité. À l’intériorité silencieuse de l’épreuve interne de soi comme affect et qui est pourtant l’originaire, la pensée, jusqu’à nous, préfère la lumière qui donne un monde externe au regard.