Introduction : « Seul » l’homme… ?

Il va être question pour nous de juger petit à petit l’anthropomorphisme. Le mot « anthropomorphisme » fut inventé par Xénophane ( vers -570) pour se moquer de ces grecs qui donnaient à leurs dieux forme humaine. Les dieux étant des dieux, que savons-nous d’eux ? Devons-nous nous les représenter, les sculpter, à notre image ?

Nous pourrions aller, dans l’affirmation de similitudes, non seulement des hommes aux animaux, mais plus largement aux plantes, puisqu’il y a une continuité chez les vivants. Quand est sorti sur nos écrans le film  L’intelligence des arbres, de Julia Dordel et Guido Tölke, de 2018, dans les discussions avec le public à la fin de la séance, il y avait régulièrement un spectateur pour dire : « Mais parler de l’intelligence, en ce qui concerne les arbres, n’est-ce pas de l’anthropomorphisme ? » Il voulait dire que les forestiers, les biologistes, emploieraient alors une notion qui n’est manifestement qu’un propre de l’homme pour parler d’êtres vivants qui ne sont pas des hommes : ce serait l’effet d’une projection dépourvue de pertinence. Or, pourquoi ce reproche ? Il part de la certitude que l’immense dignité de l’humain implique son infinie différence par rapport au reste des créatures : non, nous ne sommes pas des animaux ! Nous serions plus proches des anges que des bêtes ! Il y a comme une discontinuité entre nous et les créatures terrestres : nous sommes supérieurs. Ce qui saute aux yeux quand on regarde ce qui s’est toujours passé dans notre culture, c’est que la liste des « propres » de l’homme nous a toujours donné un immense avantage sur n’importe quel autre être de la création, baleine ou éléphant, dauphin ou tigre : nous serions « seuls » capables de science, de morale, d’art, etc… Cela exprime notre superbe, que contredit la théologie de l’éminence, dont l’anthropologie est le secret : nous sommes intelligents, bons, volontaires et Dieu est éminemment puissant, bon, volontaire, etc…, par rapport à nous, qui nous retrouvons finalement, dans cette opération, fort dépourvus. Quelle que soit cette oscillation pendulaire entre le zéro et l’infini, tous les « propres » de l’homme que notre histoire culturelle a avancés : la bipédie, le langage, la raison, la technique, la peinture, la politique, la culture, le rire, les larmes, etc. sont supposés nous élever au-dessus de la condition animale. La liste des prédicats n’est pas close, tant il y a eu d’ingéniosité, d’inventivité, pour compléter la proposition de base, qui est de la forme : « l’homme est le seul animal qui… » (complétez) !

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