La question de l’image chez Fichte

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image-fichte.gifDu point de vue de l’histoire de la philosophie, il est frappant de voir deux philosophes aussi différents que Fichte et Bergson accorder à l’image un rôle essentiel pour traiter du rapport de l’esprit au monde. Ce que Bergson fait dans Matière et mémoire sur le plan d’une psychologie philosophique, en vue d’expliciter la nature de la perception, Fichte le fait dans le contexte différent de la systématisation de l’idéalisme transcendantal, en développant une W.L. , une logologia qui deviendra une doctrine de l’image. On ne poursuivra pas ici le parallèle entre les deux auteurs pour ce qui est du traitement de l’image, on s’intéressera seulement à la fonction du Bild, du Bilden dans la pensée de Fichte. Généralement on voit dans la W.L. une systématisation de l’idéalisme critique et de la théorie kantienne du schématisme, ce qui expliquerait le rôle donné à l’imagination (Einbildungskraft) dans l’analyse fichtéenne du mécanisme de production des représentations nécessaires du Moi fini. Cependant, jusqu’en 1800, jamais le premier Fichte n’a déduit du rôle éminent de l’Einbildungskraft la conséquence selon laquelle nos représentations ne seraient que des images de l’être : si le Moi est producteur d’images, en aucun cas Fichte n’accepte ici un dualisme réel entre le phénomène et la chose en soi, que la théorie de l’imagination transcendantale a justement pour but de supprimer. Les images comme produits renvoient à l’activité du Moi et non à un être hors du Moi, a fortiori supérieur au Moi. L’image comme telle ne devient l’objet d’une thématisation explicite par Fichte que lorsque l’Einbildungskraft est pensée à partir de la nature de Bild, ce qui semble paradoxal puisque le produit semble éclairer l’instance productive, défiant tout ce que l’idéalisme critique nous avait appris jusque là. Cette inversion n’a rien de surprenant si on rappelle les médiations spécifiques qui renvoient au destin de la W.L. lors de sa réception et si on tient compte des objections émises à son propos par les adversaires et les contradicteurs de Fichte. Après la Lettre de Jacobi et la Querelle de l’Athéisme, Fichte modifie la présentation de la W.L. et opère des modifications doctrinales qui lui apparaissent indispensables pour sauver l’idéalisme face au nouveau dogmatisme qui s’annonce.

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