Montesquieu, L’Esprit des lois. L’esclavage des nègres

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Le livre XV de L’Esprit des Lois met en rapport « les lois de l’esclavage civil » avec « la nature du climat ». L’esclavage civil est défini comme « l’établissement d’un droit qui rend un homme tellement propre à un autre homme, qu’il est le maître absolu de sa vie et de ses biens. » (chap. 1) « propre » : nous y lisons un rapport de propriété, un droit propriétaire.

Montesquieu est un homme de son siècle, et la prospérité de Bordeaux et de sa région est due en grande partie au commerce des esclaves. Il y en a, discrètement, l’écho dans cette page. Manifestement, Montesquieu pour autant ne justifie pas du tout cet état de choses, loin s’en faut. Il est noble, il est homme de robe ; et ce n’est pas au commerce qu’il doit le statut social dont il a hérité. Mais il ne s’agit pas que de lui, ni de sa région, justement : toute cette page ironique montre qu’il se tient à grande distance de cette réalité historique ; comme dans les Lettres persanes aussi, il avait cultivé, la distance culturelle grâce à une tentative de se mettre à la place d’un autre : le persan (qui écrit des lettres) et qui, voyageant en Europe, la considère d’un tout autre œil que nous. L’imagination, le transport imaginaire dans une autre subjectivité, sont de méthode en ce cas.

Nous avons affaire là à un texte écrit avec tout l’art de la rhétorique.

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