Traité de l’âme – II, 1-5 ; III, 3-4
Le Peri psychés est un texte déroutant. C’est un traité de l’âme, ce qui pour nous à l’époque des sciences cognitives a quelque chose d’exotique. Mais en outre il parle de l’âme d’un point de vue auquel la tradition de la métaphysique classique nous a déshabitués, qui, dans la tradition cartésienne a défini l’âme comme substance pensante. Or l’approche aristotélicienne est naturaliste, biologique : l’âme est principe de vie. Voilà donc un double anachronisme: traiter de l’âme en y cherchant l’explication scientifique de la vie.
Au début du XXè siècle, on a pris l’habitude de définir la philosophie d’Aristote par la doctrine “hylèmorphique”, c’est-à-dire la théorie selon laquelle l’être est constitué de deux principes complémentaires, la matière et la forme. C’est bien sur le modèle de la relation entre la forme et la matière qu’est pensée la relation de l’âme et du corps : l’âme est au corps, ce que la forme est à la matière. Cette thèse qui a pour but d’établir l’inséparabilité entre l’âme et le corps nous oblige à une sorte de « psychanalyse » du cartésianisme, c’est-à-dire en l’occurrence : 1/ penser l’âme et le corps à partir de leur unité plutôt que de leur distinction : ce qui est substance, c’est l’âme informant la matière du corps, là où Descartes envisage l’union de l’âme et du corps comme l’union (mystérieuse ?) de deux substances séparées ; 2/ ne pas identifier l’âme à la pensée ou à l’esprit (mind) en termes plus modernes.