L’image de l’âme – Platon, République, IX, 588b-589c

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Ici se suivent une image de l’âme composée de trois instances et ce qui s’en conclut sur la justice et l’injustice de l’homme. C’est l’ordre intérieur au sein des parties de l’âme qui déterminerait à la fois la justice ou l’injustice de l’homme, et qui justifierait l’éloge de la justice, le blâme de l’injustice. Il apparaît clairement que être injuste ou juste n’est pas affaire de pensées, de paroles, d’actes, autrement dit de conduite visible, que d’autres peuvent percevoir ; que ces qualificatifs décrivent une qualité d’âme : la meilleure pour le juste, la pire pour l’injuste. Ce serait donc au sein même de « l’homme intérieur » , autrement dit de l’âme de chacun, que se jouerait sa vertu majeure, la justice, qui suppose les trois autres vertus : un esprit qui juge bien, avec sagesse ; un cœur courageux, indigné par l’injustice et qui se met au service de la vérité et du bien ; et un ventre habitué à la sobriété, à la chasteté. Le tout, bien ordonné, ferait une âme juste. La justice serait l’excellente qualité d’une âme. Si l’on appelle « caractère » la qualité ou le défaut interne d’une âme, la justice et l’injustice procéderaient d’un caractère, qui détermine une façon d’aborder la vie, une position dans l’existence. Quand une âme est le siège d’une guerre intérieure, elle va porter cette guerre hors d’elle, jouer des coudes, se trouver ses ennemis, lutter pour prendre son plaisir : sa violence intime s’exprimera dans une violence dans les relations humaines. Mais si une âme est apaisée, par sa bienveillance envers chacun, elle pacifiera les relations humaines.

Ce que nous nous demandons, c’est si Platon nous propose ici, par la même occasion, une responsabilité de chacun envers soi-même : décrit-il des caractères naturellement donnés, opposant le tempérant au libidineux, le courageux au lâche, le sage à l’ignorant ; ou bien décrit-il ici, sans le dire, le secret-même de la liberté intérieure ? Suggère-t-il que c’est à chacun de prendre la situation de son âme en main, de travailler en soi l’ordre des parties, de savoir bien placer la commandement là où il faut, dans la tête, même si cela prend du temps, même s’il faut s’exercer ? Quelle est la place de la nature, quelle est celle de l’éducation de soi dans le fait d’être un homme juste ?

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