Introduction à l’Essai sur l’entendement humain

On n’imagine guère qu’une œuvre aussi ardue et « indigeste » que l’Essay concerning Human Understanding de John Locke ait pu être un jour un « best-seller ». Son succès foudroyant est pourtant antérieur à sa publication en mars 1690 puisque, deux ans plus tôt, cherchant l’effet d’annonce, Jean Le Clerc avait publié en Hollande, où Locke avait jugé prudent de s’exiler, un « Abrégé » qui avait fait grand bruit. L’auteur qui a cinquante six ans est pourtant presque inconnu de la République des Lettres, ayant beaucoup écrit mais peu publié. Ses amis ignorent même que cet homme politique, honorable membre de la Royal Society, curieux de sciences et d’études bibliques, puisse se piquer de philosophie.
Dès septembre 1692 la première édition de l’ouvrage est épuisée, la seconde « avec de larges additions » (1694), sera elle-même suivie de deux autres du vivant de Locke (1695 et 1700). Deux éditions se succéderont encore en 1706 et 1710. C’est sur la quatrième, à laquelle Locke a notamment ajouté le chapitre 2.33 consacré à l’association des idées, que Pierre Coste règle, sous l’œil vigilant de l’auteur , une traduction française qui démultipliera l’audience de l’œuvre, non seulement en France mais dans toute l’Europe savante. Leibniz l’annotera, jusqu’à ce que les marges ne lui soient plus suffisantes et qu’il faille prendre une nouvelle feuille de papier, dont sortiront les célèbres Nouveaux Essais sur l’entendement humain et un genre philosophique nouveau dans les temps modernes, la réécriture amendante.

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