On présentera ici deux moments : d’abord on rappellera comment à Francfort la religion représente pour Hegel un domaine irréductible à la réflexion et au concept qui ne peut penser la vie infinie. C’est la dimension supralogique de la religion que Hegel souligne alors. Ensuite on montrera comment la réconciliation de la vie et du concept a lieu à Iéna, dans la Phénoménologie de l’Esprit sous la forme d’une logique dialectique de l’Esprit absolu. L’abandon du paradigme esthétique privilégiant la beauté comme unité des différences se traduit dans le développement phénoménologique par la revalorisation du christianisme non pas comme Révélation d’une transcendance irréductible mais comme religion où le concept se réalise comme concept. Hegel se déprend d’une certaine fascination pour la belle totalité grecque et la comparaison entre Athènes et Jérusalem perd de sa pertinence. S’amorce ainsi dans le texte de Hegel ce qu’on trouvera dans les Leçons sur la philosophie de la religion, la prise en compte d’un matériau abondant permettant de penser la logique du fait religieux dans son histoire.
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2010/08/hegel_philopsis.jpeg262200Giassi Laurenthttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngGiassi Laurent2015-06-07 12:00:002023-04-07 09:21:45La logique de la religion dans la Phénoménologie de l’esprit
Chapitre I « Parmi les étants, certains sont par nature… » : pour délimiter le champ des objets que la physique se propose d’étudier, Aristote distingue deux genres d’être : les uns sont par nature, les autres par d’autres causes. Ces autres causes sont le hasard (dont il sera question ultérieurement dans le livre II, et qui n’est cause que par accident) et l’intelligence humaine, l’art, la technè, l’activité productrice de l’intelligence agissant selon une règle rationnelle, comme le montre la suite.
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/04/aristote-philopsis.jpg230200Pascal Dupondhttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngPascal Dupond2015-06-05 17:26:122020-04-28 16:31:58Commentaire du livre II de la Physique
Pour situer la question d’aujourd’hui, je partirai de l’héritage cartésien. Descartes nous apprend que les objets de notre pensée relèvent d’une des trois notions primitives de l’esprit. Les deux premières, qui distinguent l’âme et le corps, ouvrent le chemin que l’esprit doit suivre pour trouver la vérité. La troisième, qui les réunit en un seul être, est la dimension de la vie. La perception sensible relève de la troisième notion primitive dans la mesure où le monde qui s’ouvre à elle est celui d’une âme unie à un corps. Quel que soit son rôle dans la vie et même dans la connaissance, la perception sensible souffre d’un préjugé fondamental consistant à attribuer sans critique aux choses ce qui en apparaît dans l’union. « La principale erreur et la plus ordinaire », dit la 3e Méditation, « consiste en ce je juge que les idées qui sont en moi sont semblables ou conformes à des choses qui sont hors de moi » (Alquié II, 334).
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/12/merleau_ponty-philopsis-e1608719395415.jpg374320Pascal Dupondhttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngPascal Dupond2015-06-05 10:52:372023-08-15 10:30:26Comment la Phénoménologie de la perception comprend-elle la question de la vérité?
La perception est pour Merleau-Ponty notre ouverture, notre initiation au monde et à l’être, elle est une lumière naturelle à laquelle le monde apparaît comme une sorte d’unité de l’être et du sens. Cette unité de l’être et du sens est à la fois impérieuse, irrécusable, mais elle est aussi, dans le même temps, ouverte, présomptive, toujours en attente de sa confirmation : le monde, selon le mot de Malebranche, est un « ouvrage inachevé ». Et une vie humaine n’est peut-être rien d’autre que « l’acte même par lequel nous reprenons ce monde inachevé pour essayer de le totaliser et de le penser ».
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/12/merleau_ponty-philopsis-e1608719395415.jpg374320Pascal Dupondhttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngPascal Dupond2015-06-05 10:38:502021-10-26 09:48:12De la perception à l’œuvre de culture. L’itinéraire philosophique de Maurice Merleau-Ponty
Les rapports du corps et de l’esprit1 se prêtent à deux lectures opposées, dualiste ou moniste. Chacune peut invoquer en sa faveur, comme Descartes le montre, une sorte d’évidence. En faveur du dualisme, on fera valoir que « les actes intellectuels n’ont aucune affinité avec les actes corporels », dans la mesure où « la pensée qui est la raison commune en laquelle ils conviennent, diffère totalement de l’extension qui est la raison commune des autres ». En faveur du monisme on alléguera l’expérience de la vie, qui témoigne du lien le plus intime entre l’intériorité subjective et l’extériorité matérielle.
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/philopsis_Merleau-Ponty-e1606497822687.jpg156138Pascal Dupondhttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngPascal Dupond2015-06-05 10:24:032022-03-23 18:24:06La question du « corps de l’esprit » dans la philosophie de Merleau-Ponty
Il n’y a point d’exposition canonique, continue ou exhaustive, chez Leibniz, de l’espace et du temps mais des notes dispersées dans certaines correspondances (à de Volder, à des Bosses, avec Clarke), des dialogues comme les Entretiens de Philarète et d’Ariste ou les Nouveaux Essais. Au travers de ce corpus la question de l’espace semble nettement privilégiée, le temps n’étant souvent traité que par analogie. Or cela se tourne assez aisément en paradoxe : en effet, l’espace, avec ses traits extensifs et quantitatifs, ne paraît concerner que les phénomènes et non les êtres, selon Leibniz ; dans la vérité ontologique des choses, il n’est donné que des monades, des substances douées de spontanéité interne, d’une force primitive qui détermine une tendance permanente au changement, de sorte que le successif de ces changements développe en série la loi qui fait l’individualité même de cette monade. Cette force, inscrite en chaque monade au temps de la création et par laquelle elle devient susceptible d’exprimer tous les prédicats contenus en l’entendement divin dans sa notion complète, est une pure virtualité interne : la monade est sans porte ni fenêtre, elle développe à partir de soi et sans aucun rapport à ce qui pourra se nommer une détermination d’extériorité. Il n’est rien de spatial dans les êtres, mais le temps semble en revanche s’y inscrire intimement, comme par une bénédiction divine qui convertit en puissance singulière d’auto-développement la diversité infinie de la notion complète.
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/11/Gottfried-Wilhelm-Leibniz-philopsis-e1604505131835.jpg479407Dauvois Danielhttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngDauvois Daniel2015-03-22 20:03:592020-11-23 16:37:41L’espace et le temps chez Leibniz
La définition du temps comme « nombre du mouvement selon l’antérieur et le postérieur » permet à Aristote de montrer que la réalité du temps dépend de la conjonction du mouvement physique et de l’acte de l’âme. En effet, selon le Stagirite, le temps est ce qui, dans le mouvement, est nombré par l’âme. Or, cette découverte explicite et consciente de la quiddité du temps, donnant lieu à sa définition, suppose, outre la perception du mouvement et celle du temps, la perception concomitante de l’acte de l’âme nombrant le mouvement. C’est qu’en effet, pour Aristote, la réalité du temps comme mouvement et comme acte de l’âme est immédiatement présente à la conscience qui perçoit le temps. L’âme qui définit le temps connaît ainsi simultanément le mouvement, sa propre place dans le mouvement qu’elle connaît et la transcendance de son acte par rapport au mouvement qu’elle nombre. Ainsi, les deux pôles de la réalité du temps aristotélicien s’impliquent d’une manière particulière dans la perception du temps puisque l’un d’eux, l’âme qui nombre, est engagé dans la réalité même du mouvement perçu. Ce qui revient à dire que, chez le Stagirite, l’ontologie du temps implique nécessairement une psychologie ou, pour l’exprimer encore autrement, que le temps, en se manifestant grâce à l’âme comme du nombrable propre au mouvement, acquiert par là même une certaine objectivité.
Dans son traité 45, De l’Éternité et du Temps, Plotin rattache lui aussi l’âme au temps, mais il fait de celui-ci la vie de l’âme, donnant ainsi une définition totalement originale du temps
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/11/Plotin-philopsis.jpg681569Pigler Agnèshttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngPigler Agnès2015-03-22 19:13:102021-10-31 17:19:42La théorie aristotélicienne du temps nombre du mouvement et sa critique plotinienne
Leibniz est un génie universel, qui contribua aux mathématiques, à la logique, au droit, à l’histoire, à la linguistique, à la science et à la technologie de façon telle qu’à chaque fois son nom mérita de garder une place importante dans l’histoire. C’est en philosophie pourtant que son apport est le plus décisif. Son système a été très vite reconnu comme l’une des constructions majeures de l’histoire de la métaphysique et il n’a cessé d’être commenté et discuté. Au XIXe siècle, la philosophie de Lotze l’a renouvelé en un sens, contre le kantisme et l’hégélianisme. Et, encore en notre siècle, il a suscité l’intérêt des penseurs les plus éminents : on peut citer parmi d’autres B. Russell, M. Heidegger, Ortega y Gasset, Lovéjoy, ou, en France, G. Deleuze et M. Serres.
La philosophie qu’il a proposée est à double titre une philosophie de l’harmonie : harmonie qu’elle affirme du monde, et harmonie qu’elle tente de réaliser parmi les philosophes.
Nihil est sine ratione, rien n’est sans raison : c’est à bon droit que Leibniz peut, à l’occasion, appeler « mon principe de la Raison suffisante » cette formule cardinale du rationalisme dans sa figure moderne, dont il a donné l’énoncé et le nom définitifs. Soucieux pourtant de lester ce principe de l’autorité de la tradition pour mieux pouvoir en user dans la défense de ses propres doctrines, Leibniz le présente fréquemment comme bien connu, quoiqu’insuffisamment reconnu. Hartsoeker « l’approuve en général, mais sans l’appliquer » ; Clarke « l’accorde en paroles » et « le refuse en effet » : c’est le destin paradoxal du « Principe de la nécessité d’une Raison suffisante, que bien des gens ont eu dans la bouche ; mais, dont ils n’ont point connu la force ». La tâche que Leibniz s’assigne en propre consistera donc moins à « désigner » verbalement ce principe qu’à l’ « effectuer » réellement, c’est-à-dire à en déployer toute la puissance théorique jusque dans ses dernières conséquences.
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/11/Gottfried-Wilhelm-Leibniz-philopsis-e1604505131835.jpg479407Sullerot Vincenthttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngSullerot Vincent2015-02-26 23:00:002024-08-10 14:32:31Rien n’agit sans raison. L’enjeu pratique du principe de raison chez Leibniz
C’est au moment même où Hegel commence la révision de la Phénoménologie de l’Esprit en vue d’une nouvelle publication que sa mort met brutalement fin au projet, laissant ainsi imaginer à ses élèves, à ses commentateurs, enfin à la postérité, ce qu’aurait pu être l’œuvre. Ce qui va nous intéresser ici ce n’est pas ce qu’aurait pu être cette œuvre une fois corrigée en fonction des développements ultérieurs de la pensée de Hegel mais la correspondance possible entre la Phénoménologie et l’Encyclopédie sous sa version définitive. Il s’agira de montrer comment, sous une forme et une présentation diverses, Hegel met en œuvre une même philosophie de l’esprit, attestant ainsi du rapport privilégié existant entre l’œuvre de 1807 et l’œuvre de 1830. Hegel est un philosophe qui s’est toujours moqué de ceux qui voulaient fonder la philosophie au lieu de philosopher, préliminaire aussi absurde que celui qui consiste à critiquer la faculté de connaître avant et au lieu de connaître. Or une introduction à la philosophie risque toujours de rentrer dans ce cas de figure : soit elle annonce le contenu de l’œuvre sous une forme narrative ou descriptive, en tout cas de façon non systématique, soit elle fait partie de l’œuvre et dans ce cas ce n’est pas une introduction. Hegel a rencontré ce problème dans ses grandes œuvres, aussi bien dans la Phénoménologie de l’Esprit, qu’au début de la Grande Logique ou de l’Encyclopédie dans des contextes à chaque fois différents.
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2010/08/hegel_philopsis.jpeg262200Giassi Laurenthttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngGiassi Laurent2015-02-26 22:30:002021-11-08 17:54:10Phénoménologie et Encyclopédie : une même philosophie de l’esprit ?
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La logique de la religion dans la Phénoménologie de l’esprit
Hegel, La religionOn présentera ici deux moments : d’abord on rappellera comment à Francfort la religion représente pour Hegel un domaine irréductible à la réflexion et au concept qui ne peut penser la vie infinie. C’est la dimension supralogique de la religion que Hegel souligne alors. Ensuite on montrera comment la réconciliation de la vie et du concept a lieu à Iéna, dans la Phénoménologie de l’Esprit sous la forme d’une logique dialectique de l’Esprit absolu. L’abandon du paradigme esthétique privilégiant la beauté comme unité des différences se traduit dans le développement phénoménologique par la revalorisation du christianisme non pas comme Révélation d’une transcendance irréductible mais comme religion où le concept se réalise comme concept. Hegel se déprend d’une certaine fascination pour la belle totalité grecque et la comparaison entre Athènes et Jérusalem perd de sa pertinence. S’amorce ainsi dans le texte de Hegel ce qu’on trouvera dans les Leçons sur la philosophie de la religion, la prise en compte d’un matériau abondant permettant de penser la logique du fait religieux dans son histoire.
Commentaire du livre II de la Physique
AristoteChapitre I
« Parmi les étants, certains sont par nature… » : pour délimiter le champ des objets que la physique se propose d’étudier, Aristote distingue deux genres d’être : les uns sont par nature, les autres par d’autres causes. Ces autres causes sont le hasard (dont il sera question ultérieurement dans le livre II, et qui n’est cause que par accident) et l’intelligence humaine, l’art, la technè, l’activité productrice de l’intelligence agissant selon une règle rationnelle, comme le montre la suite.
Comment la Phénoménologie de la perception comprend-elle la question de la vérité?
La vérité, Le corps, Merleau-PontyPour situer la question d’aujourd’hui, je partirai de l’héritage cartésien.
Descartes nous apprend que les objets de notre pensée relèvent d’une des trois notions primitives de l’esprit.
Les deux premières, qui distinguent l’âme et le corps, ouvrent le chemin que l’esprit doit suivre pour trouver la vérité.
La troisième, qui les réunit en un seul être, est la dimension de la vie.
La perception sensible relève de la troisième notion primitive dans la mesure où le monde qui s’ouvre à elle est celui d’une âme unie à un corps.
Quel que soit son rôle dans la vie et même dans la connaissance, la perception sensible souffre d’un préjugé fondamental consistant à attribuer sans critique aux choses ce qui en apparaît dans l’union. « La principale erreur et la plus ordinaire », dit la 3e Méditation, « consiste en ce je juge que les idées qui sont en moi sont semblables ou conformes à des choses qui sont hors de moi » (Alquié II, 334).
De la perception à l’œuvre de culture. L’itinéraire philosophique de Maurice Merleau-Ponty
La culture, La perception, Merleau-PontyLa perception est pour Merleau-Ponty notre ouverture, notre initiation au monde et à l’être, elle est une lumière naturelle à laquelle le monde apparaît comme une sorte d’unité de l’être et du sens.
Cette unité de l’être et du sens est à la fois impérieuse, irrécusable, mais elle est aussi, dans le même temps, ouverte, présomptive, toujours en attente de sa confirmation : le monde, selon le mot de Malebranche, est un « ouvrage inachevé ». Et une vie humaine n’est peut-être rien d’autre que « l’acte même par lequel nous reprenons ce monde inachevé pour essayer de le totaliser et de le penser ».
La question du « corps de l’esprit » dans la philosophie de Merleau-Ponty
Le corps, Merleau-PontyLes rapports du corps et de l’esprit1 se prêtent à deux lectures opposées, dualiste ou moniste. Chacune peut invoquer en sa faveur, comme Descartes le montre, une sorte d’évidence. En faveur du dualisme, on fera valoir que « les actes intellectuels n’ont aucune affinité avec les actes corporels », dans la mesure où « la pensée qui est la raison commune en laquelle ils conviennent, diffère totalement de l’extension qui est la raison commune des autres ». En faveur du monisme on alléguera l’expérience de la vie, qui témoigne du lien le plus intime entre l’intériorité subjective et l’extériorité matérielle.
L’espace et le temps chez Leibniz
Augustin, LeibnizIl n’y a point d’exposition canonique, continue ou exhaustive, chez Leibniz, de l’espace et du temps mais des notes dispersées dans certaines correspondances (à de Volder, à des Bosses, avec Clarke), des dialogues comme les Entretiens de Philarète et d’Ariste ou les Nouveaux Essais. Au travers de ce corpus la question de l’espace semble nettement privilégiée, le temps n’étant souvent traité que par analogie. Or cela se tourne assez aisément en paradoxe : en effet, l’espace, avec ses traits extensifs et quantitatifs, ne paraît concerner que les phénomènes et non les êtres, selon Leibniz ; dans la vérité ontologique des choses, il n’est donné que des monades, des substances douées de spontanéité interne, d’une force primitive qui détermine une tendance permanente au changement, de sorte que le successif de ces changements développe en série la loi qui fait l’individualité même de cette monade. Cette force, inscrite en chaque monade au temps de la création et par laquelle elle devient susceptible d’exprimer tous les prédicats contenus en l’entendement divin dans sa notion complète, est une pure virtualité interne : la monade est sans porte ni fenêtre, elle développe à partir de soi et sans aucun rapport à ce qui pourra se nommer une détermination d’extériorité. Il n’est rien de spatial dans les êtres, mais le temps semble en revanche s’y inscrire intimement, comme par une bénédiction divine qui convertit en puissance singulière d’auto-développement la diversité infinie de la notion complète.
La théorie aristotélicienne du temps nombre du mouvement et sa critique plotinienne
Aristote, Le temps, PlotinLa définition du temps comme « nombre du mouvement selon l’antérieur et le postérieur » permet à Aristote de montrer que la réalité du temps dépend de la conjonction du mouvement physique et de l’acte de l’âme. En effet, selon le Stagirite, le temps est ce qui, dans le mouvement, est nombré par l’âme. Or, cette découverte explicite et consciente de la quiddité du temps, donnant lieu à sa définition, suppose, outre la perception du mouvement et celle du temps, la perception concomitante de l’acte de l’âme nombrant le mouvement. C’est qu’en effet, pour Aristote, la réalité du temps comme mouvement et comme acte de l’âme est immédiatement présente à la conscience qui perçoit le temps. L’âme qui définit le temps connaît ainsi simultanément le mouvement, sa propre place dans le mouvement qu’elle connaît et la transcendance de son acte par rapport au mouvement qu’elle nombre. Ainsi, les deux pôles de la réalité du temps aristotélicien s’impliquent d’une manière particulière dans la perception du temps puisque l’un d’eux, l’âme qui nombre, est engagé dans la réalité même du mouvement perçu. Ce qui revient à dire que, chez le Stagirite, l’ontologie du temps implique nécessairement une psychologie ou, pour l’exprimer encore autrement, que le temps, en se manifestant grâce à l’âme comme du nombrable propre au mouvement, acquiert par là même une certaine objectivité.
Dans son traité 45, De l’Éternité et du Temps, Plotin rattache lui aussi l’âme au temps, mais il fait de celui-ci la vie de l’âme, donnant ainsi une définition totalement originale du temps
Le panpsychisme leibnizien
LeibnizLeibniz est un génie universel, qui contribua aux mathématiques, à la logique, au droit, à l’histoire, à la linguistique, à la science et à la technologie de façon telle qu’à chaque fois son nom mérita de garder une place importante dans l’histoire. C’est en philosophie pourtant que son apport est le plus décisif. Son système a été très vite reconnu comme l’une des constructions majeures de l’histoire de la métaphysique et il n’a cessé d’être commenté et discuté. Au XIXe siècle, la philosophie de Lotze l’a renouvelé en un sens, contre le kantisme et l’hégélianisme. Et, encore en notre siècle, il a suscité l’intérêt des penseurs les plus éminents : on peut citer parmi d’autres B. Russell, M. Heidegger, Ortega y Gasset, Lovéjoy, ou, en France, G. Deleuze et M. Serres.
La philosophie qu’il a proposée est à double titre une philosophie de l’harmonie : harmonie qu’elle affirme du monde, et harmonie qu’elle tente de réaliser parmi les philosophes.
Rien n’agit sans raison. L’enjeu pratique du principe de raison chez Leibniz
Agrégation externe 2025 le hasard et la nécessité, LeibnizNihil est sine ratione, rien n’est sans raison : c’est à bon droit que Leibniz peut, à l’occasion, appeler « mon principe de la Raison suffisante » cette formule cardinale du rationalisme dans sa figure moderne, dont il a donné l’énoncé et le nom définitifs. Soucieux pourtant de lester ce principe de l’autorité de la tradition pour mieux pouvoir en user dans la défense de ses propres doctrines, Leibniz le présente fréquemment comme bien connu, quoiqu’insuffisamment reconnu. Hartsoeker « l’approuve en général, mais sans l’appliquer » ; Clarke « l’accorde en paroles » et « le refuse en effet » : c’est le destin paradoxal du « Principe de la nécessité d’une Raison suffisante, que bien des gens ont eu dans la bouche ; mais, dont ils n’ont point connu la force ». La tâche que Leibniz s’assigne en propre consistera donc moins à « désigner » verbalement ce principe qu’à l’ « effectuer » réellement, c’est-à-dire à en déployer toute la puissance théorique jusque dans ses dernières conséquences.
Phénoménologie et Encyclopédie : une même philosophie de l’esprit ?
Hegel, L'espritC’est au moment même où Hegel commence la révision de la Phénoménologie de l’Esprit en vue d’une nouvelle publication que sa mort met brutalement fin au projet, laissant ainsi imaginer à ses élèves, à ses commentateurs, enfin à la postérité, ce qu’aurait pu être l’œuvre. Ce qui va nous intéresser ici ce n’est pas ce qu’aurait pu être cette œuvre une fois corrigée en fonction des développements ultérieurs de la pensée de Hegel mais la correspondance possible entre la Phénoménologie et l’Encyclopédie sous sa version définitive. Il s’agira de montrer comment, sous une forme et une présentation diverses, Hegel met en œuvre une même philosophie de l’esprit, attestant ainsi du rapport privilégié existant entre l’œuvre de 1807 et l’œuvre de 1830. Hegel est un philosophe qui s’est toujours moqué de ceux qui voulaient fonder la philosophie au lieu de philosopher, préliminaire aussi absurde que celui qui consiste à critiquer la faculté de connaître avant et au lieu de connaître. Or une introduction à la philosophie risque toujours de rentrer dans ce cas de figure : soit elle annonce le contenu de l’œuvre sous une forme narrative ou descriptive, en tout cas de façon non systématique, soit elle fait partie de l’œuvre et dans ce cas ce n’est pas une introduction. Hegel a rencontré ce problème dans ses grandes œuvres, aussi bien dans la Phénoménologie de l’Esprit, qu’au début de la Grande Logique ou de l’Encyclopédie dans des contextes à chaque fois différents.