Les limites de la culture
A la fois tristesse devant le constat qu’une culture peut avoir atteint ses limites (décadence, affaiblissement, perte de sa puissance…) et crainte devant le caractère illimité d’une culture (dans un système politique qui se veut total, dans une puissance technique qui rend tout possible et donc qui ne laisse rien deviner ni prévoir..). Ambivalence par rapport à la culture dont on craint toujours de voir apparaître les limites qui en signifieraient le terme prochain, et dont le caractère illimité inquiète parce qu’il rend l’avenir incertain, imprévisible, parce qu’il risque d’échapper au contrôle humain.
Ambivalence qui tient à la condition humaine : dans sa nécessaire finitude temporelle, l’homme est limité ; mais de par cette même nature, il appréhende ce qui dépasse cette finitude, ce qui se présente comme illimité. Car l’illimité peut toujours prendre le sens de ce qui est indéterminé, chaotique, bref peut toujours s’apparenter au néant. C’est la même crainte du néant qui nous fait craindre la limite et qui nous la fait espérer.
Culture présente cette ambivalence : elle crée des oeuvres, cherche à pérenniser ce que les hommes ont fait, elle peut s’accompagner d’une volonté de progrès ; cherche à orienter les actions humaines par une finalité ; veut durer et construire. En même temps culture crée des normes, fixe des limites, vit des interdits qu’elle crée et par lesquels elle cherche à se maintenir. Culture n’est pas le monde de l’indéfini des possibles mais celui de la détermination : une culture exclut, empêche, résiste.