Publications par Babonnaud Marc

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Malebranche, Entretiens sur la métaphysique et sur la religion

Dieu nous unit au monde par l’union de l’âme et du corps. Elle ne se résume pas à un principe d’individuation, mais a pour rôle de nous permettre d’agir dans le monde d’une manière appropriée et sage, sans que, pour autant, toute notre attention soit mobilisée par le commerce que nous avons avec les choses et avec les autres.
La connaissance est une vision en Dieu selon Malebranche. Elle suppose un silence du corps et des passions, afin que nous puissions connaître la véritable nature des choses, qui ne consiste en rien d’autre que leurs idées. Tout, y compris les corps, se connaît par les idées ; l’étendue étant celle par laquelle nous pouvons connaître les êtres physiques et comprendre la nature de leurs modifications.
La connaissance ne doit donc rien à la perception et, lorsqu’il y a perception, elle n’a pas pour objet de connaître. C’est pourquoi, Malebranche va penser la perception dans des termes totalement affranchis de la représentation. Pourtant, la perception possède bien un rôle et même un rôle fondamental, un rôle que l’on ne peut trouver qu’étonnant tant il se rapproche des thèses de la phénoménologie, qui font de la perception ce qui nous assure de notre être au monde : elle permet l’identification des phénomènes et des situations, elle permet de comprendre l’action des individus en vue de leur propre conservation, mais également en vue d’un commerce agréable avec les autres et ce, en étant totalement dissociée de la connaissance et de la vérité. La perception que nous avons des choses est une compréhension de signes, qui montre que les relations sociales, les actions de l’union de l’âme et du corps, ne sont ni vraies ni fausses, mais obéissent à un autre critère, à une autre forme de bien que celle à laquelle la connaissance ouvre. Le monde perceptif possède une utilité. Il est conforme à l’Ordre, sans pour autant à avoir à se dire jamais en terme de vérité. Cela veut dire que la vérité n’épuise pas le sens de notre condition. Certes, tout est conforme à l’Ordre voulu par Dieu, mais tout en l’homme ne se ramène pas à la recherche de la vérité ; la perception engage l’homme dans la compréhension du monde, l’introduit dans une réalité de significations, comme si, pour une certaine part, notre existence n’avait pas à se dire ou à se fonder dans le vrai.
Ceci est d’autant plus étonnant, que cette « vérité » de notre condition, que la phénoménologie « découvrira » et thématisera bien plus tard, est esquissée par Malebranche à travers l’une de ses théories les plus décriées, et en apparence les plus « folles », la théorie des causes occasionnelles.

Les limites de la culture

A la fois tristesse devant le constat qu’une culture peut avoir atteint ses limites (décadence, affaiblissement, perte de sa puissance…) et crainte devant le caractère illimité d’une culture (dans un système politique qui se veut total, dans une puissance technique qui rend tout possible et donc qui ne laisse rien deviner ni prévoir..). Ambivalence par rapport à la culture dont on craint toujours de voir apparaître les limites qui en signifieraient le terme prochain, et dont le caractère illimité inquiète parce qu’il rend l’avenir incertain, imprévisible, parce qu’il risque d’échapper au contrôle humain.
Ambivalence qui tient à la condition humaine : dans sa nécessaire finitude temporelle, l’homme est limité ; mais de par cette même nature, il appréhende ce qui dépasse cette finitude, ce qui se présente comme illimité. Car l’illimité peut toujours prendre le sens de ce qui est indéterminé, chaotique, bref peut toujours s’apparenter au néant. C’est la même crainte du néant qui nous fait craindre la limite et qui nous la fait espérer.
Culture présente cette ambivalence : elle crée des oeuvres, cherche à pérenniser ce que les hommes ont fait, elle peut s’accompagner d’une volonté de progrès ; cherche à orienter les actions humaines par une finalité ; veut durer et construire. En même temps culture crée des normes, fixe des limites, vit des interdits qu’elle crée et par lesquels elle cherche à se maintenir. Culture n’est pas le monde de l’indéfini des possibles mais celui de la détermination : une culture exclut, empêche, résiste.

La logique ou l’art de penser

Explication du texte d’Arnauld et Niclole, Quatrième partie, Ch. I « L’utlité que l’on peut tirer des ces spéculations…. fin. »

« Texte traversé par un certain nombre de paradoxes : d’abord la démonstration y est considérée comme ce qui atteste de la faiblesse de la raison, là où habituellement on en fait une preuve de sa puissance. Elle renvoie l’homme à ses limites quand elle sert au contraire, chez Descartes par exemple, à lui ouvrir un champ illimité du savoir. Elle ruine ses prétentions à une connaissance absolue en toute chose alors qu’elle fournit des raisons d’être certain ».