L’existence ou la joie de vivre ?
Quand il s’agit de penser une notion, des références s’imposent d’emblée à notre esprit. Ainsi ce vers d’Horace, carpe diem, quam minimum credula postero queLeconte de Lisle traduit par cueille le jour, et ne crois pas au lendemain. Comprise à tort comme une exhortation à l’hédonisme, ce vers est plutôt une invitation à vivre l’instant dans la quiétude et à surmonter l’inquiétude relativement à ce qui ne dépend pas de nous, et notamment la mort.
Une question simple doit cependant être adressée à cette tentative de vivre pleinement l’instant : est-ce parce que nous nous détournons du temps présent que nous sommes malheureux ? N’est-ce pas plutôt parce que nous sommes fondamentalement malheureux que nous nous détournons du présent, qui est pourtant le seul temps qui nous appartienne, pour nous tourner vers un avenir imaginaire ?
C’est cette seconde hypothèse que Pascal va démontrer dans la Pensée 172 de l’éd. Brunschwig, texte de ce fait incontournable pour penser la notion de bonheur.
La question du bonheur pourra dès lors être posée avec les termes mêmes de Pascal : Est-il possible de tenir au temps présent ? Se divertir de notre misère est-ce le seul bonheur possible pour un être humain ? Et ce bonheur est-il aussi illusoire que le prétend Pascal ? Ce qui peut encore se formuler de la façon suivante : ma condition d’être vivant dois-je la penser en termes d’existence ou puis-je parler de joie de vivre ?