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Le texte que, faute d’en avoir le titre originel, à jamais perdu, nous appellerons manuscrit de Kreuznach relève incontestablement d’un paradoxe : ce qui se présente sous les auspices d’un exercice exégétique assez classique, rédigé dans la retraite d’un cabinet d’études, à savoir le commentaire paragraphe par paragraphe de la troisième partie, die Sittlichkeit, des Principes de la philosophie du droit de Hegel, constitue en fait le premier fruit d’une crise multiple, à la fois personnelle, sociale et politique, qui marque cette année 1843 en Allemagne. Il est donc nécessaire d’en dire quelques mots avant de procéder à l’étude du texte proprement dit. L’année qui précède la rédaction de ce manuscrit sonne en effet le glas des espoirs de réforme libérale que l’intelligentsia et l’opinion publique progressistes avaient placé en Frédéric Guillaume IV lors de son accession au trône prussien, en 1840.

Le cogito apparaît dans l’œuvre de Merleau-Ponty à trois niveaux de signification.
Il désigne d’abord le « phénomène central » de l’ouverture et de l’évidence du monde, à même la naïveté de la foi perceptive : « tel est le vrai cogito – il y a conscience de quelque chose, quelque chose se montre, il y a phénomène […] » . Cette première signification correspond à ce que Merleau-Ponty appelle dans la Phénoménologie de la perception le cogito tacite.
En un second sens, il désigne une explicitation philosophique, une première articulation « en thèse ou énoncé » de ce phénomène central, celle qui formule l’évidence du monde comme la certitude qu’il y a de l’être, en tant qu’être pour moi.
Enfin il désigne l’interprétation proprement réflexive de l’évidence du monde comme certitude de l’esprit pensant devant et pour lui-même ou, comme le dit Merleau-Ponty, «l’adéquation et le consentement de la pensée à la pensée, la transparence de ce que je pense pour moi qui le pense », l’auto-manifestation d’ « un être qui est pour soi sitôt qu’il est, parce que tout son être est d’apparaître, donc de s’apparaître, – et qui s’appelle l’esprit » .

Dans la cinquième partie de l’Éthique, Spinoza traite de l’éternité de l’âme. Son souci est de s’écarter du concept métaphysique traditionnel d’immortalité. Toutes les preuves de l’immortalité de l’âme font intervenir, comme le ressort de l’argumentation, une thèse sur la substantialité de l’âme. C’est pourquoi la carrière philosophique de l’immortalité de l’âme est frappée au cœur par la critique kantienne des paralogismes, établissant que le sujet a pour sens d’être de ne pas être une res, une substance. La désubstantialisation kantienne de la subjectivité rend impossible la preuve de l’immortalité de l’âme sous sa forme traditionnelle grecque. La problématique spinoziste de l’éternité de l’âme relève d’un horizon tout à fait différent. En effet, non seulement elle est libre de toute présupposition sur la substantialité de l’âme, mais elle conserve, même dans l’argumentation la plus rigoureuse et la plus serrée, une dimension non argumentative, une dimension d’expérience : « nous sentons et nous savons par expérience que nous sommes éternels ». Cette référence à l’expérience témoigne du lien entre la dimension spéculative et la dimension éthique de l’éternité de l’âme : le concept d’éternité ne prend son véritable sens que dans le cheminement éthique qui conduit au salut.

Commentant une pièce intitulée Solness le constructeur, le psychiatre suisse L. Binswanger prend pour thème la réalisation de soi ainsi que le sérieux, la véracité, le refus des demi-mesures, que, selon Ibsen, la réalisation de soi exige.
L’opération de la forme artistique, la Gestaltung, est un des chemins fondamentaux de la véracité et de la réalisation de soi.
L’art est une Gestaltung et ouvre la voie d’une réalisation de soi pour autant que s’y croisent l’horizontalité – la direction de sens de l’expérience et de l’amplification de soi -, et la verticalité – la direction de sens de l’amour et de l’ascension ; il y a Gestaltung là où une re-prise véritable du passé dans le présent ouvre un avenir, là où hauteur et profondeur communiquent, là où se composent et se nouent l’éternité du beau et la patience du travail de l’œuvre.
Mais l’art ne peut ainsi ouvrir la voie d’une réalisation de soi qu’en s’approchant au plus près, en faisant l’épreuve de l’ennemi intime qui le menace – de l’intérieur. Cette menace, Binswanger l’appelle présomption . La présomption survient au moment où la proportion se rompt entre l’horizontal et le vertical, l’ample et le haut, au moment où la hauteur devient une sorte d’abîme qui attire et emporte celui qui monte, jusqu’au point où il s’effondre dans le vide. La passion de la forme pure peut en venir à oublier la vie.
L’art est une voie de la réalisation de soi pour autant qu’il sait être, non une négation, mais une catharsis de la vie.

On se propose d’étudier quels ont été les foyers et les enjeux de la rencontre entre phénoménologie et psychanalyse dans les travaux de trois auteurs majeurs du courant phénoménologique : Maurice Merleau-Ponty, Paul Ricœur et Michel Henry. Cette rencontre présente une double face : elle est, du côté de la psychanalyse ou plutôt du côté d’une pensée qui se met à l’école de la psychanalyse, une mise en question de certains concepts fondamentaux de la phénoménologie (l’intentionnalité, la conscience donatrice de sens, la signification du cogito) ; elle est aussi, symétriquement, du côté de la phénoménologie, un examen critique des concepts psychanalytiques et, en particulier du double langage de la psychanalyse, de sa double référence constante à l’ordre du sens et à l’ordre de la force, à des rapports de motivation et à des rapports de causalité.

Le Principe responsabilité est traversé par deux grandes questions dont on doit préciser l’importance pour la pensée de Hans Jonas.
La première concerne l’ontologie. Dualisme et monisme sont, selon Hans Jonas, les deux tentations permanentes de l’ontologie.
Le dualisme est inévitable sur le plan phénoménal : « les actes intellectuels, disait Descartes, n’ont aucune affinité avec les actes corporels » ; et Jonas précise : « on ne peut tout simplement pas additionner d’un côté les grandeurs dans l’espace et de l’autre le sentir ; aucun dénominateur commun ne permet d’unir dans un champ théorique homogène, malgré leur co-appartenance manifeste, “étendue” et “conscience” » .
Mais le dualisme est impossible sur le plan ontologique : « la voix de la subjectivité, dans l’animal et dans l’homme a émergé des tourbillons muets de la matière et continue d’y être liée » ; la vie organique témoigne du lien le plus intime entre l’intériorité subjective et l’extériorité matérielle et le dualisme doit être abandonné. Le monisme n’offre cependant pas une meilleure issue s’il se présente simplement comme la réduction violente de l’un des deux termes à l’autre.

La phénoménologie de Husserl, surtout lorsqu’elle se fait idéalisme transcendantal, est une pensée de la subjectivité. Le sujet est transcendantal au sens où il est la condition de possibilité de ce qui se donne, de ce qui apparaît. Cette dimension transcendantale est thématisée par le concept de constitution. C’est en tant qu’elle est constituante que […]

« La nature est principe de mouvement et de changement » (Ph III, 200b10) ; il est donc impossible de connaître la nature sans questionner le mouvement ; or on « prétend » (opinion commune ou opinion savante) que « sans lieu , sans vide et sans temps il est impossible qu’il y ait du mouvement » (b20, p. 160) ; cela rend nécessaire de les étudier ; le lieu est étudié aux ch. 1 à 5, le vide aux chap. 6 à 9, le temps dans la suite du livre IV…

Les deux premiers livres établissent les conditions de possibilité d’une science de la nature. Le premier a justifié dialectiquement la réalité de l’objet de la physique: la nature comme principe de mouvement et de repos, en particulier contre les apories qu’avait soulevées les Eléates à l’encontre du mouvement. Le second a formulé les concepts fondamentaux de la physique et en particulier les différentes figures de la causalité et de la nécessité. On en vient, avec le livre III, à l’objet propre de la physique : si la nature est principe de mouvement, il est nécessaire d’étudier le mouvement : « l’ignorer, c’est nécessairement aussi ignorer la nature ». Aristote traite d’abord du mouvement lui-même (III et IV), puis de la division du mouvement quant à ses espèces (V) ou bien ses parties quantitatives (VI), puis le mouvement est considéré « relativement à son moteur », c’est-à-dire le premier moteur (VII et VIII)

Trois catalogues des œuvres d’Aristote sont parvenus jusqu’à nous.
Diogène Laërce (doxographe grec qui a vécu probablement au 3e s ap JC) recense 146 titres. Hésichios de Milet en recense 192, dont 132 déjà cités par Diogène Laërce.
Un 3e catalogue a été transmis par des auteurs arabes du 13e s. d’après des documents remontant à Andronicos de Rhodes (1e siècle avant JC), un scholarque du Lycée qui avait édité l’œuvre d’Aristote.
De ces œuvres très peu nous sont parvenues.
Rien ne nous est parvenu de ce qu’Aristote a écrit pendant les 20 années de sa présence à l’Académie et nous ne savons donc rien des modalités de la distance prise par rapport à Platon : dans les écrits qui nous sont parvenus, les références à l’enseignement de l’Académie ne sont pas nombreuses (la plus célèbre se trouve en EN, I, 4, 1096a11).