Les rapports du corps et de l’esprit1 se prêtent à deux lectures opposées, dualiste ou moniste. Chacune peut invoquer en sa faveur, comme Descartes le montre, une sorte d’évidence. En faveur du dualisme, on fera valoir que « les actes intellectuels n’ont aucune affinité avec les actes corporels », dans la mesure où « la pensée qui est la raison commune en laquelle ils conviennent, diffère totalement de l’extension qui est la raison commune des autres ». En faveur du monisme on alléguera l’expérience de la vie, qui témoigne du lien le plus intime entre l’intériorité subjective et l’extériorité matérielle.
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/philopsis_Merleau-Ponty-e1606497822687.jpg156138Pascal Dupondhttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngPascal Dupond2015-06-05 10:24:032022-03-23 18:24:06La question du « corps de l’esprit » dans la philosophie de Merleau-Ponty
La définition du temps comme « nombre du mouvement selon l’antérieur et le postérieur » permet à Aristote de montrer que la réalité du temps dépend de la conjonction du mouvement physique et de l’acte de l’âme. En effet, selon le Stagirite, le temps est ce qui, dans le mouvement, est nombré par l’âme. Or, cette découverte explicite et consciente de la quiddité du temps, donnant lieu à sa définition, suppose, outre la perception du mouvement et celle du temps, la perception concomitante de l’acte de l’âme nombrant le mouvement. C’est qu’en effet, pour Aristote, la réalité du temps comme mouvement et comme acte de l’âme est immédiatement présente à la conscience qui perçoit le temps. L’âme qui définit le temps connaît ainsi simultanément le mouvement, sa propre place dans le mouvement qu’elle connaît et la transcendance de son acte par rapport au mouvement qu’elle nombre. Ainsi, les deux pôles de la réalité du temps aristotélicien s’impliquent d’une manière particulière dans la perception du temps puisque l’un d’eux, l’âme qui nombre, est engagé dans la réalité même du mouvement perçu. Ce qui revient à dire que, chez le Stagirite, l’ontologie du temps implique nécessairement une psychologie ou, pour l’exprimer encore autrement, que le temps, en se manifestant grâce à l’âme comme du nombrable propre au mouvement, acquiert par là même une certaine objectivité.
Dans son traité 45, De l’Éternité et du Temps, Plotin rattache lui aussi l’âme au temps, mais il fait de celui-ci la vie de l’âme, donnant ainsi une définition totalement originale du temps
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/11/Plotin-philopsis.jpg681569Pigler Agnèshttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngPigler Agnès2015-03-22 19:13:102021-10-31 17:19:42La théorie aristotélicienne du temps nombre du mouvement et sa critique plotinienne
C’est au moment même où Hegel commence la révision de la Phénoménologie de l’Esprit en vue d’une nouvelle publication que sa mort met brutalement fin au projet, laissant ainsi imaginer à ses élèves, à ses commentateurs, enfin à la postérité, ce qu’aurait pu être l’œuvre. Ce qui va nous intéresser ici ce n’est pas ce qu’aurait pu être cette œuvre une fois corrigée en fonction des développements ultérieurs de la pensée de Hegel mais la correspondance possible entre la Phénoménologie et l’Encyclopédie sous sa version définitive. Il s’agira de montrer comment, sous une forme et une présentation diverses, Hegel met en œuvre une même philosophie de l’esprit, attestant ainsi du rapport privilégié existant entre l’œuvre de 1807 et l’œuvre de 1830. Hegel est un philosophe qui s’est toujours moqué de ceux qui voulaient fonder la philosophie au lieu de philosopher, préliminaire aussi absurde que celui qui consiste à critiquer la faculté de connaître avant et au lieu de connaître. Or une introduction à la philosophie risque toujours de rentrer dans ce cas de figure : soit elle annonce le contenu de l’œuvre sous une forme narrative ou descriptive, en tout cas de façon non systématique, soit elle fait partie de l’œuvre et dans ce cas ce n’est pas une introduction. Hegel a rencontré ce problème dans ses grandes œuvres, aussi bien dans la Phénoménologie de l’Esprit, qu’au début de la Grande Logique ou de l’Encyclopédie dans des contextes à chaque fois différents.
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2010/08/hegel_philopsis.jpeg262200Giassi Laurenthttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngGiassi Laurent2015-02-26 22:30:002021-11-08 17:54:10Phénoménologie et Encyclopédie : une même philosophie de l’esprit ?
La phénoménologie s’est instituée comme une nouvelle attitude philosophique, ayant pour ambition la refondation de l’ensemble du savoir. Aux yeux de Husserl – et son constat demeure de nos jours tout aussi, et même plus encore, valable – la science souffre de sa spécialisation et de la dispersion des différents ordres du savoir qui s’ignorent les uns les autres. L’ambition de la phénoménologie est de refonder le savoir, d’instituer une nouvelle Théorie de la science, capable de donner les fondements par lesquels les savoirs éclatés pourront se réunifier.
Ce lieu de fondation, Husserl n’hésite pas, parfois, à convoquer à son propos les « Mères de la connaissance » goethéennes. Elles sont les dimensions originaires qui portent toute représentation humaine, qu’elle soit scientifique, commune ou triviale. Certaines expériences fondent la pensée humaine et, par là-même, sa relation au monde. La phénoménologie se donne pour tâche de les faire apparaître. Tel est le sens du mot d’ordre si souvent repris presque comme un slogan : « Aux choses mêmes » (« Zur Sache selbst »). Il ne s’agit pas de considérer les objets (Objekte) de l’expérience, ou les choses perçues (Dinge) mais les expériences de la subjectivité par lesquelles le monde se donne.
Chez Kant la phénoménalité du réel est une conséquence des conditions subjectives de la connaissance humaine : depuis la Dissertation de 1770 il est acquis que la phénoménalité constitue la base de l’expérience et par là même de la connaissance objective . Dans la Phénoménologie de l’esprit la phénoménalité du réel ne découle pas de la nature de l’intuition humaine finie mais de l’expérience même de la conscience qui découvre que le sens de son expérience est autre que ce qu’elle croyait, ce qui correspond à l’émergence d’un nouveau phénomène, un nouvel objet de la conscience. A l’intérieur de l’œuvre elle-même consacrée à l’étude de l’apparaître de l’Esprit, le phénomène comme tel apparaît à l’intérieur de la section consacrée à la conscience : c’est le moment où les phénomènes de la conscience coïncident avec la conscience du phénomène en tant que tel, de la phénoménalité de l’être. L’analyse de cette séquence phénoménologique est intéressante car elle permet de voir comment Hegel thématise le phénomène avant la Doctrine de l’Essence (1812).
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2010/08/hegel_philopsis.jpeg262200Giassi Laurenthttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngGiassi Laurent2015-01-25 19:15:492021-11-11 10:38:26Le phénomène dans la Phénoménologie de l’esprit
Le langage semble être l’objet privilégié de la philosophie déployée par J. L. Austin. Connu pour être l’inventeur du concept de « performatif » et avoir pratiqué une « philosophie du langage ordinaire », il semble logique de voir avant tout en lui un philosophe du langage. Pourtant, l’analyse du langage n’était pas une fin en soi pour Austin : rappelons, à titre de premiers indices, qu’il occupait à l’Université d’Oxford une chaire de philosophie morale et qu’il a toujours déclaré vouloir bâtir, en analysant l’efficacité du langage, une « théorie générale de l’action ». C’est un préalable si l’on veut bien comprendre les analyses qu’il offre du langage dans son œuvre. En réalité, pour lui, comme pour nombre de ses contemporains, la philosophie du langage joue le rôle de philosophie première, en tant qu’elle permet de repérer ce que l’on peut dire à propos de ce qui est et, dès lors, de déterminer ce que l’on peut penser.
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2021/10/Austin-1-e1635698229862.jpg220173Ambroise Brunohttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngAmbroise Bruno2015-01-14 17:29:102021-10-31 16:38:20J.L. Austin et le langage : ce que la parole fait
L’homme fait rencontre du réel sous deux modalités opposées et inséparables, la réception et la construction: le réel est toujours indivisiblement reçuu et construit.
Selon une tradition métaphysique qui remonte à la philosophie grecque, le «reçu» relève de la sensibilité, le «construit» relève de l’entendement ou de la raison.
Il y a cependant plusieurs façons de comprendre la complémentarité, la synergie de la sensibilité et de la raison dans la rencontre du réel. Le centre de gravité de cette synergie peut se déplacer soit vers la raison soit vers la sensibilité. Dans la premier cas, la rencontre du réel relève de la « connaissance », dans le second de l’ « épreuve », au sens où Eschyle fait dire au chœur tragique : « ce qu’on apprend, c’est par l’épreuve pathos ». Le style du premier chemin vers le réel, celui de la « connaissance », je le présenterai en me référant à la philosophie kantienne. Que, dans notre rapport aux choses, le centre de gravité des opérations de l’esprit soit du côté de la raison, c’est ce dont témoigne la disproportion, dans la Critique de la raison pure, entre l’Esthétique transcendantale et la Logique transcendantale ; et cependant Kant conserve une conscience aiguë, héritée de l’empirisme, de ce qui du réel nous vient de l’être affecté et demeure ainsi radicalement résistant et opaque à la raison…
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2021/01/Gorgone-philopsis.jpg235220Pascal Dupondhttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngPascal Dupond2015-01-03 19:04:122023-04-17 10:00:51Saisir le réel ou être saisi par le réel ?
Il faut parler pour comprendre la parole, écrire pour expliquer l’écriture. Le langage est requis pour entendre le langage : le dire est la condition du dit, mais le dire prend toujours la forme d’un dit. Certes la pensée se saisit du langage pour penser – penser l’être (ontologie) et penser la pensée ou penser les conditions de la pensée comme conditions de la pensée de l’être (logique) -, mais c’est dans et par le langage que la pensée s’y emploie : le langage paraît n’être qu’un instrument pour la pensée, mais la pensée ne peut se délester du langage qui de ce fait apparaît comme plus qu’un instrument. Le langage porte au-delà de lui-même, mais jamais sans lui. Voilà le paradoxe initial et peut-être ultime. D’un côté le langage vise ce qui n’est pas lui (le langage dit les choses : les décrit, les raconte, les classe… : l’opposition entre signum et res paraît bien fondée), mais ce qui est visé n’est pensable et connaissable que par le langage : ce qui ne se laisse pas dire ne se laisse pas penser et connaître….
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/05/moulin-langage-philopsis.gif241200Cournarie Laurenthttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngCournarie Laurent2015-01-03 19:00:012021-10-31 16:12:17Introduction aux problèmes philosophiques du langage : la triplicité du langage
Merleau-Ponty comprend la philosophie, à la suite de Husserl, comme nous invitant à revenir aux choses mêmes, à retrouver un contact ou une coïncidence avec les choses. Le philosophe communique avec le monde et cette communication est de l’ordre du contact, sa vision est une « palpation ». Mais en même temps il interroge, ce qui exige écart et langage. La question est de savoir quel peut être le statut du langage dans une philosophie qui pense le rapport à l’Être comme contact et interrogation. Si la philosophie est contact ou coïncidence, si elle doit prendre au sérieux le retour aux choses mêmes, alors elle n’a pas à « chercher un substitut verbal du monde que nous voyons » . Mais si elle est interrogative, elle n’a pas non plus à dépasser le langage en recherchant une coïncidence sans langage et sans distance. Le langage n’est pas l’ennemi de la coïncidence que recherche la philosophie. Le philosophe est philosophe pour autant qu’il veut « mettre en mots un certain silence en lui qu’il écoute » . Si ce projet doit ne pas être un « effort absurde », il faut que ce silence se prête au langage ou que la coïncidence avec les choses que le philosophe recherche ne soit pas étrangère au langage, bref qu’il y ait un « langage de la coïncidence »…
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/12/merleau_ponty-philopsis-e1608719395415.jpg374320Pascal Dupondhttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngPascal Dupond2014-11-23 17:41:392021-10-26 16:24:25La question du langage dans « Le visible et l’invisible »
Si Locke avait eu « le courage ou le loisir de […] corriger les défauts » de son Essai sur l’entendement humain, l’Essai sur l’origine des connaissances humaines aurait-il vu le jour ? L’« Introduction » de l’Essai de 1746 semble imputer aux « longueurs, aux répétitions et au désordre qui règnent » dans le traité lockien son incapacité à mener à bien son projet initial : refaire de la métaphysique une science première, capable de « rendre l’esprit lumineux, précis et étendu, et, par conséquent, le préparer à l’étude de toutes les autres » , en cherchant l’origine de la connaissance dans l’expérience. En réaction contre la métaphysique de l’innéisme s’ébauche ainsi une autre métaphysique, centrée sur l’étude génétique des idées et des opérations de l’entendement humain. Pourtant, « il ne paroît pas que ce philosophe ait jamais fait son principal objet du traité qu’il a laissé sur l’entendement humain » : en reléguant négligemment l’étude « des mots » dans la troisième partie de son ouvrage, Locke ne s’est pas seulement privé de précieuses « lumières sur le principe de nos idées » ; il a, s’indigne Condillac, sabordé son objet, puisqu’il « a passé trop légèrement sur l’origine de nos idées » – l’objet même, pourtant, de l’enquête lockienne. D’où la nécessité, pour Condillac, de reprendre à nouveaux frais le projet lockien, en restituant au langage la place qui doit être la sienne dans la nouvelle métaphysique. Plus précisément : « j’ai cru qu’elle devait faire une part considérable de mon ouvrage, soit parce qu’elle peut encore être envisagée d’une manière neuve et étendue, soit parce que je suis convaincu que l’usage des signes est le principe qui développe le germe de toutes nos idées ». L’Essai sur l’origine des connaissances humaines, dès lors, ne saurait être lu exclusivement comme une série d’annotations dans les marges du traité lockien : la découverte de Condillac constitue une solution nouvelle au problème de l’origine de nos idées. La position inédite du problème du rapport entre signes et idées, entre langage et connaissance, n’annonce-t-elle pas en fin de compte la conversion de la métaphysique en une grammaire des idées ?
https://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/11/Etienne-Bonnot-de-Condillac-philopsis-e1605692189141.jpg187158Nail Cécilehttps://philopsis.fr/wp-content/uploads/2020/02/logo_philopsis3-300x107.pngNail Cécile2014-11-23 17:38:162021-11-07 18:00:36Métaphysique et langage dans l’ « Essai sur l’origine des connaissances humaines » de Condillac
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