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A la recherche d’homo sociologicus. Du problème de l’individualité en sociologie à la rationalité du comportement social
Les sciences humainesDans les pages qui suivent, je m’attacherai à mettre en lumière certains éléments de la représentation de l’homme comme être social impliquée par la sociologie. Plutôt qu’un exposé général sur le vaste thème des sciences humaines, je propose un itinéraire particulier – en privilégiant notamment les orientations bibliographiques – à partir de la question suivante : si les sciences humaines ont été innovantes sur le plan épistémologique, ne peut-on dire que le véritable bouleversement opéré par l’une des plus importantes, la sociologie, concerne sinon une nouvelle représentation de l’homme, du moins une redéfinition des pouvoirs rationnels de l’individu ? On va voir que s’il est centré sur la sociologie, cet itinéraire permet d’appréhender une thématique qui concerne plusieurs autres sciences humaines, dans la mesure où les difficultés que rencontre la science sociale dans la constitution de son paradigme, valent aussi mutatis mutandis pour elles.
La sociologie peut être définie comme la science de l’homme tel qu’il se représente lui-même par le biais de ses relations sociales ; elle apparaît ainsi comme un savoir empirique constitué par toutes les études de terrain qu’un sociologue est susceptible d’imaginer puis de mener à bien, touchant les multiples formes des relations que les hommes entretiennent entre eux. Ces derniers sont à la fois des producteurs et des consommateurs, des vendeurs et des acheteurs, des fils/filles, des époux/ses et des pères ou des mères, des citoyens, des administrés et parfois des administrateurs, des usagers de multiples services publics, ou encore des fidèles de telle ou telle religion, cette liste étant impossible à clore. Etude méthodique des comportements adoptés par les hommes vivant les uns avec les autres, toute sociologie est « politique », et illustre une idée de l’homme comme être agissant en fonction de son ou de ses groupes sociaux de référence qui paraît bien connue de la philosophie.
‘Sociologie et philosophie’, d’Emile Durkheim : Le social et le mental
Les sciences humainesLe recueil Sociologie et philosophie rassemble des textes de Durkheim parus à des dates différentes et portant sur des objets variables. On s’efforcera ici de ressaisir l’unité de la démarche de Durkheim à partir d’un problème précis.
Partons de la confrontation entre sociologie et philosophie telle qu’elle fut organisée par Célestin Bouglé lorsqu’il rassembla ce recueil. La sociologie, ayant acquis son indépendance comme science, se retourne vers la philosophie avec laquelle elle a d’abord rompu. Plutôt qu’une rivalité entre deux entreprises théoriques concurrentes, où l’une essaie de couronner l’autre, il s’agit d’une rencontre sur un terrain commun où la philosophie accepte de poser ses questions – le rapport de l’esprit et du monde – en examinant des données empiriques – le mental – et où la sociologie vient théoriser son propre objet : le social. La signification de cette rencontre doit se lire en deux sens. D’une part, le social constitue lui-même une forme d’activité mentale, c’est-à-dire qu’une société est un ensemble d’idées et de croyances – conception essentielle pour une sociologie qui a mis au cœur de ses préoccupations le problème de l’éducation. D’autre part, et plus profondément, le mental est déjà une forme d’activité sociale, puisqu’il consiste en une association d’idées – notion qu’il faut entendre au sens de la psychologie associationniste mais plus encore en un sens sociologique : l’association n’est pas une simple relation entre des idées ou des individus, elle produit une réalité nouvelle. C’est la grande découverte de Durkheim : le social constitue « une synthèse sui generis » à partir des individus séparés…
L’animal, figure du Tout-Autre
L'animalIl semble qu’aujourd’hui une véritable révolution philosophique se produise et que la frontière entre l’homme et l’animal tende à s’estomper. Nous savons non seulement en effet que l’homme a des origines communes avec les grands singes, mais aussi que les animaux sont capables d’apprendre et de transmettre et qu’ils ont développé ce que l’on n’hésite plus à nommer des « cultures » animales. Ce qui commence ainsi à faire question, c’est l’idée même d’un propre de l’homme, et avec lui tout l’humanisme métaphysique qui a formé l’axe directeur de l’ensemble de la philosophie moderne depuis Descartes.
Il y eut pourtant déjà, avec la parution en 1859 de De l’origine des espèces un « démenti infligé à l’égoïsme naïf de l’humanité », selon les termes employés par Freud qui, dans son Introduction à la psychanalyse de 1916, soulignait qu’après la révolution copernicienne, qui a montré que la terre n’était pas le centre de l’univers, la révolution darwinienne « a réduit à rien les prétentions de l’homme à une place privilégiée dans l’ordre de la création, en établissant sa descendance du règne animal et en montrant l’indestructibilité de sa nature animale ». Mais il faut cependant reconnaître que si la question de l’animal apparaît aujourd’hui comme une question centrale du point de vue philosophique, éthique et juridique, c’est essentiellement parce que, depuis une quarantaine d’années, s’est éveillée la conscience de l’appartenance de l’homme à une « seule Terre » aux ressources limitées et à un destin qu’il partage avec l’ensemble des espèces vivantes.
Le vivant
Le vivant« L’observation scientifique, écrit le biologiste Ernest Kahane (La Vie n’existe pas, Editions rationalistes, 1962) nous montre des êtres vivants, de la matière vivante, des phénomènes vitaux… » – des êtres vivants : la plante, l’animal ; de la matière vivante : le tissu végétal, un fragment de feuille, à partir duquel on peut recréer, sous certaines conditions, la plante entière ou bien le tissu épithélial ou osseux de l’animal ; les phénomènes vitaux : la photosynthèse, la dégradation des sucres. Cette proposition souligne que le biologiste, à supposer qu’il veuille renoncer, en raison de ce qu’il se représente comme une exigence scientifique, à l’idée de vie, n’en est pas moins contraint, pour désigner l’objet de son étude, à utiliser des termes dérivés des mots « vie » et « vivre », c’est-à-dire le participe présent « vivant » et l’adjectif « vital », le premier de ces termes intervenant lui-même en deux occurrences, comme prédicat du terme « être » ou comme prédicat du terme « matière ». La langue française réserve le terme « être » (au sens où l’on parle d’êtres vivants, mais aussi d’être humains ou d’êtres pensants), par contraste avec les « choses », aux formes de réalité ou d’existence présentant non seulement une unité complexe mais une sorte d’individualité, de conatus, de référence à soi, d’autonomie. Un « être » est, à un degré ou à un autre, « auto-normé ». Nous constatons donc que, même si « la vie n’existe pas », le biologiste (et avec lui le philosophe, qui réfléchit sur la connaissance du vivant) n’en doit pas moins supposer que le terme « vivant » (avec les deux substantifs dont il peut être attribut) et le terme « vital », malgré les différences de sens et d’emploi, ont un référent commun justifiant leur appartenance à une même sphère de phénomènes. Et cette référence commune conduit à se demander comment articuler les termes « être vivant », « matière vivante », « phénomènes vitaux ».
Définir, décrire et classer en biologie
La logique et l'épistémologieOn admet souvent qu’Aristote a créé la taxonomie. En réalité, s’il y a chez lui certains éléments laissant envisager une classification des êtres vivants, celle-ci n’existe pas explicitement dans ses écrits qui nous sont parvenus (et il est peu probable qu’elle ait existé dans ceux qui sont perdus). Tout au plus évoque-t-il un certain nombre de critères sur lesquels une classification pourrait se fonder : la forme des animaux, celle de leurs organes, leur mode de vie (terrestre, aquatique, aérien), leur mode de déplacement (marche, reptation, vol, nage), la nature de leur alimentation (herbivore, carnivore, …), leur caractère, etc . Les critères relatifs à la forme de l’animal et de ses organes sont manifestement les plus importants (surtout les organes de la nutrition et de la génération, qui sont les deux fonctions essentielles, celles qui ressortissent à l’âme nutritive, primordiale en matière de vie).
Dans la pratique, le critère distinctif le plus utilisé par Aristote est la possession ou la non-possession de sang. Les animaux qui en ont sont les plus parfaits et les plus chauds. Ceux qui n’en ont pas sont moins parfaits et ont moins de chaleur vitale. À la place du sang, ils possèdent un liquide qui n’est pas rouge et qu’Aristote qualifie de sérum (selon lui, c’est un sang imparfait). Cette distinction en animaux sanguins et non-sanguins recouvre à peu près la distinction que nous faisons entre vertébrés (avec sang rouge) et invertébrés (sans sang rouge). Et c’est effectivement une distinction fondamentale.
Pour le reste, il n’y a rien de bien arrêté, et Aristote, qui semble avoir perçu les limites de ses différents critères, se sert de l’un ou l’autre selon ses centres d’intérêt au moment donné, mais sans rien généraliser.
La seule méthode systématique en usage en son temps (notamment à l’Académie de Platon) était celle dite « de la dichotomie ». Elle distinguait les êtres selon qu’ils possédaient ou non tel caractère choisi plus ou moins arbitrairement ; puis, dans chacun des deux groupes ainsi obtenus, selon qu’ils possédaient ou non tel autre caractère, et ainsi de suite. Aristote refusait de recourir à ce procédé binaire qui lui semblait insatisfaisant et source d’erreurs. Il préférait une approche moins artificielle, une comparaison plus globale des êtres, qui donnait des résultats conformes aux répartitions traditionnelles des animaux en grands groupes (quadrupèdes, oiseaux, poissons, etc.). Dans ces conditions, il ne pouvait pas établir une classification générale et systématique des êtres vivants. Et, de fait, chez lui, il n’y a guère de vraiment net qu’une distinction entre genres et espèces.
L’animal dans la Philosophie de la nature de Hegel
Hegel, L'animal, La nature, La nature. Agrégation interne 2026Si on veut savoir ce que Hegel pense de l’animal il faut se rapporter à la partie du système qui le concerne, la Physique organique de la Philosophie de la nature dans l’Encyclopédie des sciences philosophiques. Si on part de la philosophie « appliquée », comme l’esthétique ou la philosophie de la religion, on risque de trouver certaines analyses qui ressemblent plus à des jugements de valeur qu’à de véritables propositions philosophiques sur l’animalité. Hegel en effet adopte souvent dans ses cours une démarche comparative pour distinguer l’animal et l’homme en tant qu’esprit, cette comparaison servant surtout à faire ressortir la supériorité de l’esprit sur une existence encore naturelle. Par exemple dans les Cours d’esthétique on voit bien que dans son jugement sur l’art symbolique le mélange des formes humaines et animales lui apparaît inférieur à l’expression plastique du corps humain dans l’art classique (art grec). De même que dans les Leçons sur la philosophie de la religion l’adoration de formes naturelles et d’êtres vivants dans la religion naturelle apparaît comme une ébauche de la religion véritable où l’esprit se rapporte à l’Esprit. Cela ne suffit pas à porter un verdict complètement négatif sur la façon dont Hegel pense l’animal, malgré les remarques d’Elisabeth de Fontenay qui rattache Hegel à la tradition rationaliste qui déconsidère l’animalité en général.
Y a-t-il une exception humaine ?
L'animalL’être humain n’est pas en peine quand il s’agit de se penser comme un être d’exception. Bien au contraire, l’idée qu’il pourrait n’être qu’une chose ou un animal comme les autres se présente d’abord à lui comme une idée farfelue, voire une provocation. Et pour y répondre, il est rarement à court d’arguments. Car au-delà de ce qui pourrait apparaître comme le signe d’une certaine vanité, les faits eux-mêmes semblent lui donner raison : l’humain est non seulement un être vivant, et en cela il se distingue des simples choses, mais il est aussi un être capable de culture, et en cela il se distingue des autres vivants, plantes et animaux. En effet, si l’on admet que la culture au sens large, selon la définition qu’en propose Denis Kambouchner, « recouvre tout ce par quoi l’existence humaine apparaît comme s’élevant au-dessus de la pure animalité, et plus généralement, à travers elle, au-dessus de la simple nature » , l’homme est bien celui qui inaugure la distinction traditionnelle entre nature et culture, distinction par laquelle il semble pouvoir s’excepter de toutes les autres réalités avec lesquelles il coexiste dans le monde.
Le droit et la société d’aujourd’hui
La justiceDans le thème qu’il m’a été demandé d’explorer – « le droit et la société d’aujourd’hui » -, il faut voir à coup sûr l’expression d’une préoccupation à la fois théorique et pratique de la pensée contemporaine. Depuis les années 1970, on s’accorde de manière quasi-unanime à diagnostiquer dans les sociétés actuelles le « malaise » ou la « crise », endémique et multiforme, du droit, de la loi et de l’État. Devant les symptômes de la pathologie juridique, se manifeste, dans une littérature philosophico-juridique foisonnante – dans le monde anglo-saxon et germanique plus qu’en France il est vrai -, la volonté de proposer une théorisation nouvelle du droit. Il ne s’agit pas d’une nouvelle « querelle des Anciens et des Modernes ». Mais, dans le monde « désenchanté » où nous vivons, le droit, privé d’assises sacrées – religieuses ou métaphysiques – puise encore son inspiration dans le rationalisme des philosophies modernes. Or, nombreux sont aujourd’hui les auteurs qui refusent de penser le droit comme un système normatif axiologiquement fondé – C. Schmitt, par exemple, parle de « la tyrannie des valeurs » – et certains pensent que considérer le droit comme un ordre prescriptif relevant d’exigences rationnelles pures est une attitude obsolète. Il semble donc que, dans l’univers juridique actuel, il soit devenu urgent de renoncer, totalement ou partiellement, aux paradigmes de la rationalité moderne pour leur substituer des paradigmes nouveaux, plus congruents avec la situation des sociétés contemporaines.
La théorie de la justice selon Hume, Bentham et Rawls
La justiceLa justice, les passions et les fictions : La théorie de la justice selon Hume,
Bentham et Rawls.
S’il peut être intéressant de confronter les philosophies de Hume, de Bentham et de Rawls sur la question de la justice, c’est parce que nous trouvons, chez ces penseurs libéraux, trois façons différentes d’envisager la justice, concurrentes, mais d’autant plus faciles à rapporter les unes aux autres que certaines d’entre elles se sont explicitement souciées de polémiquer directement avec les autres. Hume fait rupture avec les penseurs contractualistes, dans la tradition des Whigs et de Locke, et il conçoit la justice comme un mixte d’intérêts, de raison et d’imagination. Bentham, qui reprend à son compte les arguments anti-contractualistes de son prédécesseur, accuse le caractère symbolique de la loi, rejette radicalement tout naturalisme et toute explication de la justice par les passions en promouvant systématiquement et exclusivement le principe d’utilité. Quant à Rawls, il renoue, plus de deux siècles après un déclin que l’on pouvait imaginer irrémédiable, avec la lignée interrompue des penseurs du contrat, en tenant compte des critiques de Hume et de Bentham, non sans intégrer toutefois quelques aspects de l’utilitarisme naissant de L’Enquête sur les principes de la morale ou de l’utilitarisme doctrinal de la Formation du gouvernement ou de l’Introduction aux principes de la morale et de la législation.
Introduction à la Théorie de la justice de Rawls
La justiceLe lecteur français peut avoir du mal à entrer dans la lecture de la Théorie de la justice et ne pas comprendre son intérêt et la renommée dont elle jouit. La première difficulté tient au fait qu’il aura fallu attendre seize ans pour que cet ouvrage, capital dans la philosophie anglo-saxonne, soit traduit en français. Or entre 1971, date de sa publication aux Etats-Unis et le moment de sa réception en France, la Théorie de la justice a suscité un débat intense dans la philosophie anglo-saxonne, obligeant son auteur à préciser et même à refondre sa théorie à travers de nombreux articles. On peut les lire réunis, en français, sous le titre Justice et démocratie, publié en 1993, la même année que Political Liberalism qui constitue la reformulation d’ensemble de ces mêmes articles. La traduction de ce deuxième ouvrage de Rawls est parue en France en 1995.
On se trouve donc dans cette situation singulière de disposer dans le même temps de la théorie de la justice et de ses révisions successives. Le lecteur français doit parallèlement découvrir et comprendre les thèses de la Théorie de la justice et les raisons de leur reformulation. Il se trouve presque condamné à les interpréter à la lumière de la discussion qu’elles ont engendrée. Mais il ne peut comprendre ces critiques qu’en se reportant d’abord à l’ouvrage fondamental.
Deux questions se posent donc d’emblée ensemble : quel est le but poursuivi par Rawls dans la Théorie de la justice et ce but est-il encore maintenu à partir des années 1980 ? Ce remaniement et cette autocritique modifient-elles ou non en profondeur la théorie de la justice comme équité présentée dans la Théorie de la justice ?