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« Nature morte » : un mot malheureux, selon Charles Sterling, qui évoque la Still-leven hollandaise, et sa traduction française de “vie coye”, vie tranquille, au repos, en somme la « nature reposée » de l’abbé Le Blanc en 1747. Nature morte ne daterait, semble-t-il, que de 1756. Sterling conclut cependant à ne pas abandonner le terme : « Les mots ne valent que par les associations qui en rayonnent, et il y a sans doute assez peu de gens aujourd’hui pour qui le mot de nature morte évoque le contraire de la vie » .
J’appartiens, hélas !, malgré toutes sortes d’efforts, à cette malheureuse minorité. Qui pis est, l’énoncé de l’historien de l’art, dont j’admire profondément le travail (j’aimerais qu’on ne s’y trompe pas), me paraît la forme extrême d’une injonction à ne pas entendre, à ne pas prendre en compte les « associations » (puisque le mot est prononcé ici) qui ne se laisseraient pas ranger facilement dans les cadres habituels. Car ce n’est pas l’hyperinterprétation que vise ici Sterling, mais bien l’usage le plus trivial du lexique. Par la procédure du constat, le spectateur se trouve sommé de ne pas penser cette association-là. Je suppose que c’est à cette condition qu’on est un « bon » amateur de peinture, et qu’on laisse la trivialité à ce que le XVIIIe siècle appelait le « gros du public » ou la « lie du peuple ».

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miafa.jpg Dans la salle du cinéma de quartier Le Jewel Cécilia (Mia Farrow) est entrée pour cacher ses larmes. Trompée par les fausses promesses de Gil Sheperd (Jeff Daniels), battue par Monk son mari (Danny Aiello), au chômage, subissant les rebuffades du monde entier, elle est aux abois. Ses yeux noyés de larmes ne distinguent pas d’abord les ombres qui s’agitent sur l’écran. Puis son visage se détend. Une lumière intérieure l’éclaire. Cécilia regarde, et elle prend place dans sa vision. Sublime plan que celui-ci où Woody Allen filme la métamorphose d’un visage qui entre dans la fiction. Là-bas, sur l’écran, ce ne sont plus des images qui bougent mais Ginger et Fred qui, sur les ailes de la musique d’Irving Berlin, s’élèvent aux Cieux, Heaven, i’m in Heaven…, virevoltent entre les colonnades, glissent sur un plancher immaculé qui s’étend, lisse, à perte de vue. Alors un sourire se dessine sur les lèvres de Cécilia, et dans ce sourire se signale l’absence de Cécilia au monde réel (la salle, la ville, la terre) et l’entrée dans l’espace imaginaire.

Voir les articles suivants :
La fondation aristotélicienne de la métaphysique
Logique formelle, logique transcendantale
La métaphysique de la métaphysique
Kant, Critique de la raison pure commentaire de l’Esthétique transcendantale
Le vivant

Sont ici repris quelques chapitres d’un ouvrage co-écrit par Laurent Cournarie et Pascal Dupond, intitulé La sensibilité, où le lecteur trouvera des orientations pour une réflexion sur la perception. Ce texte, que nous publions dans la collection Notes de Cours, aborde la perception à partir de quatre auteurs : Platon, Descartes, Diderot et Merleau-Ponty.

Le noyau de ce recueil est constitué par des lettres dont Pierre Lachièze-Rey avait lui-même conservé et rassemblé les doubles, en vue probablement d’une publication éventuelle. La plupart de ces lettres concernent les ouvrages de correspondants ou répondent à des demandes d’éclaircissement concernant la philosophie de l’auteur. Nous avons ajouté quelques lettres nouvelles, publiées soit d’après l’original communiqué par les correspondants ou leurs héritiers, soit d’après des doubles conservés isolément, soit d’après un brouillon.

La majeure partie de cette correspondance date d’avant 1940, et la presque totalité d’avant 1950 : ceci provient de ce que des occupations familiales de plus en plus nombreuses et ensuite la maladie ne laissèrent plus à Pierre Lachièze-Rey le loisir de conserver un double des lettres qu’il écrivait.

Aux lettres de Lachièze-Rey nous avons joint, avec l’autorisation des héritiers auxquels nous exprimons notre profonde reconnaissance, les réponses des principaux correspondants décédés (Berger, Blondel, Bréhier, Brunschvicg, Lavelle, Le Senne, le père Marc, Paliard, et le père Valensin), lorsqu’il s’agissait d’un échange continu et lorsque le dialogue pouvait y gagner en vie et en relief.

Cette bibliographie pourra être complétée en cours d’année.

Documents joints

Was ist Metaphysik ? Nous avons affaire à un composé insolite : un premier texte, la Vorlesung de 1929, que l’auteur a voulu encadrer par deux “ajouts” très nettement postérieurs : un Nachwort publié en 1943 et une Einleitung de 1949. Comment s’y prendre avec cet ensemble – à supposer qu’il s’agisse bien d’un ensemble – ? Quels rapports entretiennent ces trois textes ? Comment les deux “textes-cadres”, la Postface et l’Introduction, regardent-ils vers le texte premier, la Conférence ou le Cours inaugural ? Les deux constituent manifestement des relectures du premier. Ont-ils pour but de fixer la perspective interprétative adéquate, selon l’auteur, pour entendre convenablement le propos de la conférence (en dénonçant les mésinterprétations effectives ou possibles) ? En partie, peut-être, mais pas seulement et pas même exactement. Veulent-ils infléchir la lecture de la conférence dans un sens déterminé ? Ce serait supposer une initiale indétermination ou une équivoque, d’abord, dans son propos. Quelle indétermination, alors, quelle équivoque, et pourquoi ? Ou bien Heidegger revient-il sur ce texte premier pour rétrospectivement en dégager l’implicite?

Il ne peut être question de présenter en quelques lignes « la métaphysique de Kant » à supposer d’ailleurs (ce dont je doute) qu’elle ait jamais été produite par lui comme un système et encore moins comme un « système de la métaphysique ». Y a t il seulement un « système de Kant » ? De cela on peut aussi douter, si par système on entend le développement uni-total dans l’élément du concept de l’effectivité de l’être, dont pour nous l’Encyclopédie des sciences philosophiques de Hegel est la dernière manifestation et dont l’Ethique de Spinoza était pour l’époque, et Kant en particulier, le modèle ou le repoussoir . Mais on notera dès à présent que ni l’Ethique ni l’Encyclopédie ne se réclament de la métaphysique. Le mot est porteur d’une signification qui renvoie au transcendant et ce système uni-total de la pensée de l’être que produisent tant l’Ethique que l’Encyclopédie exclut en fait le concept même d’un « méta-physique ».

L’idée d’une fondation de la raison dans le domaine pratico-moral apparaît à plus d’un titre comme une entreprise à la fois exorbitante et vaine. Fonder, en l’espèce, cela voudrait dire trouver ce minimum universellement valable qui doit être ultimement présupposé pour qu’un acteur puisse être reconnu comme acteur moral et son action évaluée en conséquence. La première objection vient aussitôt à l’esprit : pour faire cela, il faut déjà présupposer qu’on peut se donner une définition universelle de ce qui permet de qualifier quelque chose de moral. Or, il est aisé de montrer que moral n’a pas le même sens partout, encore moins à toutes les époques, et pour parler comme Castoriadis, il faudrait dire qu’une telle définition relève de l’imaginaire instituant des sociétés, renvoie à un magma de significations imaginaires le plus souvent inaccessibles, sédimentées par l’histoire, incommensurables entre elles.(…) La raison pratique n’est peut-être alors qu’une valeur ajoutée de la tradition judéo-chrétienne, un produit historique de substitution créé pour suppléer au délitement des fondements théologiques et des principes transcendants de la morale.