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Un contenu de pensée peut-il être objectif ? Sens, objet et vérité

Frege, considéré souvent comme le fondateur de la logique moderne,
avait une haute idée de la philosophie qu’il a toujours associée directement
ou indirectement à sa réflexion sur les mathématiques1. Voir la philosophie
se rapprocher de la psychologie l’inquiétait car il y voyait un affaiblissement
du pouvoir de la pensée. Le psychologisme qu’il a critiqué, débusqué jusque
chez Husserl, tend à réduire la pensée à la représentation révélant son étroite
parenté avec l’idéalisme quand ce dernier réduit le monde et les choses à la
représentation. Ainsi la psychologie qui découvre les lois de la
représentation prétend énoncer aussi les lois de la pensée. Frege réagit
vigoureusement en montrant que les lois psychologiques de la représentation
dépendent des lois plus fondamentales qui sont les lois des nombres étroitement liées aux lois de la pensée, d’où la vanité du projet qui consiste à
réduire les lois mathématiques à des lois psychologiques.
La confusion de la pensée avec la représentation entraîne une seconde
conséquence. Pour des philosophies imprégnées de psychologie, comme
Brentano ou Husserl, la représentation n’est pas liée à une excitation
corporelle dont elle dépendrait mais à une conscience ou subjectivité
indépendante des affections naturelles et corporelles. En réduisant la pensée
à la représentation, le psychologisme met en péril l’objectivité et la vérité
visées par toute pensée ; en faisant dépendre l’objet de la pensée d’une
forme qui serait le « je pense », la révolution copernicienne n’échappe au
relativisme qu’en postulant l’universalité du sujet. Peut-on sortir du
subjectivisme (Brentano, Husserl) ou du naturalisme (Fechner, Mach) propre
à la conception psychologique de la pensée et éviter à la fois le solipsisme et
le scepticisme ?

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La quatrième remarque de l’Esthétique transcendantale face aux objections

Dans la théologie naturelle, explique Kant, on pense un objet dont
on est dépourvu d’intuition, auquel on doit attribuer un mode de
connaissance intuitif (la connaissance discursive supposant des bornes),
les conditions d’espace et de temps devant être soigneusement écartées
de ce mode de connaissance intuitif. Son intuition doit être représentée
comme une intuition intellectuelle, l’intuition de l’Etre originaire – qui
ne dépend pas quant à son existence et son intuition de l’objet – ne
peut être qu’une intuition donnant l’existence même à l’objet d’intuition.
Mais est-il permis de se représenter un tel être, de penser un tel mode
d’intuition, si l’on fait tout d’abord de l’espace et du temps des formes
objectives, des conditions a priori de toute existence? Comment ces
formes ne seraient-elles pas aussi des conditions s’appliquant à Dieu?
Il Y a inconséquence à vouloir penser Dieu dans le cadre du réalisme
transcendantal. Il ne reste plus, dans ces conditions, qu’à rapporter
espace et temps à la forme subjective de notre intuition, laquelle, à
l’opposé du mode d’intuition qui convient (autant que nous puissions
juger) à l’Etre originaire, est l’intuition d’un être essentiellement dépendant
: la représentation de l’objet n’est possible, pour nous, que pour
autant que notre capacité de représentation se trouve affectée. Notre
sensibilité, c’est précisément le caractère dérivé de notre mode d’intuition.
Espace et temps signifient notre absence d’intuition intellectuelle.
Peut-être ces formes d’intuition sont-elles celles de tout être fini
pensant (nous ne pouvons décider jusqu’à quel point elles sont le propre
de l’homme), mais cela n’ôte rien au fait qu’elles ont trait à la sensibilité.
Quand elles seraient universelles, elles ne laisseraient pas d’être des
conditions sensibles d’intuition, c’est-à-dire des conditions propres à
un être qui ne peut intuitionner que pour autant que sa capacité de
représentation se trouve affectée.

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Kant, Critique de la raison pure commentaire de l’Esthétique transcendantale

L’assise de l’ontologie critique

L’assise de l’ontologie critique est un commentaire de l’Esthétique transcendantale, rédigé par François-Xavier Chenet dans les années 90.

La présente page offre désormais l’intégralité des chapitres du volume.

Avertissement
– Ak. renvoie au Kants gesammelte Schriften.
– R suivi d’un numéro désigne les Reflexionen ou Löse Blätter de Kant figurant dans les tomes XIV-XVIII de l’édition académique.
– Pour la Critique de la raison pure, on renvoie à la page de l’édition de 1781 [A], puis à celle de l’édition de 1787 [B], au tome et à la page dans l’édition académique et à la page dans la traduction Tremesaygues et Pacaud.
– On cite généralement une œuvre donnée dans une même traduction, sauf pour des raisons d’opportunité. Les traductions sont reprises telles quelles.
– Sauf mention contraire, les italiques dans les citations correspondent à des termes soulignés par les auteurs. Les coupures sont signalées, quelle qu’en soit l’ampleur. Les termes entre crochets constituent des modifications du texte cité ou des explications ajoutées.
– Livres et articles sont mentionnés de la façon la plus abrégée possible. On trouve leurs références complètes dans la bibliographie finale.

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La question du sujet dans la philosophie kantienne

Le concept kantien de sujet est au carrefour de multiples significations héritées tant de la philosophie antique que de la philosophie moderne
En héritage de la philosophie antique, le concept kantien de sujet prend un sens qui l’apparente au concept de substance au sens d’un substrat du réel recevant les propriétés qualifiant une chose comme ceci. Kant pense le sujet comme substrat quand il le pense logiquement, c’est-à-dire comme élément de la structure prédicative de l’énoncé. Deux cas de figures sont possibles. Quand l’énoncé est considéré du point de vue de la logique formelle, les représentations faisant fonction de sujet et de prédicat sont librement permutables, si du moins on respecte les règles de la conversion : de la proposition tous les corps sont divisibles, on passe par conversion à la proposition quelque divisible est un corps (CRP B 128-129, TP 106, R 176 ). Quand l’énoncé est considérée comme connaissance, quand il se rapporte à un objet, quand la structure logique qui le régit est celui de la logique transcendantale, la permutation n’est plus possible : dans l’expérience, est sujet, c’est-à-dire substance au sens empirique, ce qui se présente, dans l’intuition, comme permanent, par différence avec le variable, qui est prédicat. Ce point est traité en particulier dans le chapitre des analogies de l’expérience portant sur le principe de permanence de la substance.

De cette première acception relève aussi ce que Kant appelle le substantiel ou le sujet proprement dit des phénomènes, lequel, en raison de la structure discursive de la connaissance humaine, ne peut rien être d’autre qu’une idée de la raison, ayant le rôle régulateur d’un focus imaginarius pour la connaissance (Prolégomènes, § 46, Vrin, p. 108-109).

En héritage de la philosophie moderne, le concept kantien de sujet prend un sens qui l’apparente à la res cogitans cartésienne. Mais Kant infléchit profondément cet héritage. Il désubstantialise la res cogitans et il distribue le Moi (Ich) en trois figures : le moi comme je pense ou l’aperception transcendantale, le moi comme personne morale, le moi empirique.

Au carrefour de ces deux héritages se trouvent les questions traitées dans les « Paralogismes de la psychologie rationnelle ». Le Moi doit nécessairement se penser lui-même comme sujet au sens où, en tant que pensant, il ne peut pas avoir le statut de prédicat. Kant écrit ainsi dans les Prolégomènes : « tous les prédicats du sens interne se rapportent au moi comme sujet et ce moi ne peut plus être encore pensé comme prédicat de quelque autre sujet » (109). Et cependant ce moi sujet ne livre aucune des connaissances que la psychologie rationnelle croyait devoir tirer se son statut de sujet.

On se propose ici de répondre à trois questions portant sur le statut de ce sujet :
– 1/ le sujet transcendantal est-il un être pensant ?
– 2/ le sujet transcendantal est-il une première personne ?
– 3/ la subjectivité est-elle réductible à la fondation transcendantale de l’objectivité ?

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La fondation aristotélicienne de la métaphysique

Ce texte est désormais publié et n’est donc plus disponible sur Philopsis. – Petite introduction à la question de l’être – Editions Pierre Tequi – Janvier 2008 Poser la question de l’être, et y répondre, c’est admettre la possibilité d’une science qui dépasse celles que nous considérons d’ordinaire comme seules scientifiques, et qui reçut le […]

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Kant, Critique de la raison pure, commentaire de l’Analytique transcendantale

Avant d’entrer dans l’explication de l’Analytique transcendantale, il importe de rappeler quelques principes généraux qui sont indispensables à l’intelligence du kantisme.

Commençons par signaler qu’il y a deux conceptions fondamentales de la vérité : l’une que l’on pourrait appeler expressive et l’autre que l’on désignerait à juste titre par le nom de constructive.

La vérité a été définie traditionnellement adaequatio intellectus et rei. Mais, dans la doctrine traditionnelle, l’adaequatio est celle de la conformité de l’esprit ou, plus exactement de l’idée à une réalité préalable qu’il s’agit d’exprimer, de telle sorte que l’idée est toujours, selon l’expression de Brunschvicg un état second. A l’intérieur du schème précédent, on pourra d’ailleurs distinguer de nombreuses nuances. Dans une théorie du réalisme du monde extérieur, il s’agira pour l’esprit de donner une transcription exacte de ce monde considéré comme un monde de choses en soi dont l’esprit devrait fournir en quelque sorte une fidèle photographie. Dans une théorie du réalisme des essences, il s’agira de faire un inventaire de ces essences préalablement données. Dans une thèse empiriste, l’idée devra toujours avoir un prototype dans la sensation et ne pourra jamais être une invention absolue. Ainsi, comme nous le disons, plusieurs théories différentes peuvent s’installer au sein de la vérité expressive, mais une logique interne à laquelle elles ne sauraient se soustraire donnera nécessairement le primat à l’une d’entre elles. Il s’agit de savoir dans quel domaine l’affirmation peut être valable et constituer précisément une vérité quand on a fait de l’idée un état second ; or on voit que ce domaine est strictement limité au phénomène individuel et subjectif, au moment seul où il se présente, et sans qu’il soit possible de jamais aller au-delà. Nous en voyons bien la preuve dans le développement du doute cartésien, puisque ni le monde extérieur, c’est-à-dire l’univers du réalisme, ni les essences éternelles, c’est-à-dire le monde des « réaux », de ceux qui hypostasient les vérités éternelles, ni le passé ne peuvent être légitimement affirmés sans le recours à la véracité divine. Seul le cogito se suffit à lui-même, mais, une fois enfermé dans le cogito, c’est-à-dire dans l’existence de l’esprit au seul moment actuel, on ne peut en sortir que par le détour de l’argument ontologique. Le cogito, comme l’a dit Balmès, est une ancre, mais ce n’est point un phare. Si l’on se refuse, par conséquent, à admettre l’argument ontologique, on restera nécessairement enfermé dans le cogito et on se bornera à la seule affirmation légitime de l’événement. La logique de la thèse de la vérité expressive ramène donc nécessairement à Protagoras et à ses fameuses formules : « L’homme est la mesure de toutes choses » et « La sensation est la science »….

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Aux sources de l’Etat selon Hobbes

D’APRES LES ELEMENTS OF LAW NATURAL AND POLITIC :

RATIO, ORATIO, RATIOCINATIO

Diderot, dans une lettre à Sophie Volland, s’extasiait sur “le traité sublime de la nature humaine” rédigé par Hobbes en 1640. Voilà, estimait-il, Locke et Helvétius, aussi bien que La Bruyère et La Rochefoucauld, dépassés, voire écrasés par les “vérités” relatives aux “principaux ingrédients de la nature humaine” qu’entasse Hobbes avec un ordre éblouissant. Si Diderot jugeait mauvaise la traduction que venait de donner le baron D’Holbach des treize premiers chapitres des Elements of Law, il en recommandait néanmoins la lecture, une fois l’an, à son enfant et à son amie. Pas plus que D’Holbach, il ne pouvait demeurer indifférent à l’universel mécanisme auquel le philosophe de Malmesbury rapportait la nature et les œuvres de l’homme et il était frappé par l’insistance avec laquelle Hobbes, dans tous ses ouvrages d’ailleurs, scrutait la nature humaine – à la fois la nature en l’homme et la nature de l’homme. Diderot, qui désapprouvait le “hobbisme” à raison de la pente politique qui, à ses yeux, l’emportait vers l’absolutisme, avait néanmoins le tort de ne pas souligner, et probablement de ne pas saisir, le lien serré qui, selon Hobbes, rattache la politique à l’anthropologie. Or, dans le corpus du philosophe anglais, ce lien est essentiel. Il apparaît expressément dès les Elements of Law. Seulement, pour comprendre le rapport qu’entretient la politique avec l’anthropologie, il est nécessaire d’interroger à la fois les circonstances dans lesquelles fut rédigé l’écrit de 1640 et la manière dont les thèses alors énoncées se répercuteront dans les œuvres ultérieures du philosophe (I). Nous pourrons alors mesurer l’importance que, dans la première partie des Elements of Law intitulée Human nature, prend la coexistence de ce que D’Holbach appelle de manière pittoresque les “deux ingrédients” de la nature humaine : la passion et la raison. En effet, c’est moins la juxtaposition de ces “two principal parts of our nature” que leur rapport quasiment dialectique qui, sous la conduite de la raison, détermine la spécificité de l’humaine nature. C’est pourquoi il importe d’examiner ce que sont la nature, la place et la fonction de la raison qui fait l’humanité de l’homme (II). Cependant, Hobbes n’étudie la nature humaine – il le dit lui-même – que dans la mesure où sa connaissance permet de comprendre les causes profondes de la condition politique des hommes, point nodal de la réflexion du philosophe. C’est pourquoi Hobbes explique, en une démarche d’une rigueur logique exemplaire, ce qu’est l’institution de l’état civil par les pouvoirs de la raison : parce que le propre de la raison (ratio) est de parler (oratio) et de raisonner (ratiocinatio), le geste le plus authentique de la nature humaine est d’arracher l’homme à sa condition naturelle en édifiant l’artifice de la condition civile ou de l’Etat. L’homme, décidément, n’est pas un animal comme les autres (III).

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Malebranche, Entretiens sur la métaphysique et sur la religion

Dieu nous unit au monde par l’union de l’âme et du corps. Elle ne se résume pas à un principe d’individuation, mais a pour rôle de nous permettre d’agir dans le monde d’une manière appropriée et sage, sans que, pour autant, toute notre attention soit mobilisée par le commerce que nous avons avec les choses et avec les autres.
La connaissance est une vision en Dieu selon Malebranche. Elle suppose un silence du corps et des passions, afin que nous puissions connaître la véritable nature des choses, qui ne consiste en rien d’autre que leurs idées. Tout, y compris les corps, se connaît par les idées ; l’étendue étant celle par laquelle nous pouvons connaître les êtres physiques et comprendre la nature de leurs modifications.
La connaissance ne doit donc rien à la perception et, lorsqu’il y a perception, elle n’a pas pour objet de connaître. C’est pourquoi, Malebranche va penser la perception dans des termes totalement affranchis de la représentation. Pourtant, la perception possède bien un rôle et même un rôle fondamental, un rôle que l’on ne peut trouver qu’étonnant tant il se rapproche des thèses de la phénoménologie, qui font de la perception ce qui nous assure de notre être au monde : elle permet l’identification des phénomènes et des situations, elle permet de comprendre l’action des individus en vue de leur propre conservation, mais également en vue d’un commerce agréable avec les autres et ce, en étant totalement dissociée de la connaissance et de la vérité. La perception que nous avons des choses est une compréhension de signes, qui montre que les relations sociales, les actions de l’union de l’âme et du corps, ne sont ni vraies ni fausses, mais obéissent à un autre critère, à une autre forme de bien que celle à laquelle la connaissance ouvre. Le monde perceptif possède une utilité. Il est conforme à l’Ordre, sans pour autant à avoir à se dire jamais en terme de vérité. Cela veut dire que la vérité n’épuise pas le sens de notre condition. Certes, tout est conforme à l’Ordre voulu par Dieu, mais tout en l’homme ne se ramène pas à la recherche de la vérité ; la perception engage l’homme dans la compréhension du monde, l’introduit dans une réalité de significations, comme si, pour une certaine part, notre existence n’avait pas à se dire ou à se fonder dans le vrai.
Ceci est d’autant plus étonnant, que cette « vérité » de notre condition, que la phénoménologie « découvrira » et thématisera bien plus tard, est esquissée par Malebranche à travers l’une de ses théories les plus décriées, et en apparence les plus « folles », la théorie des causes occasionnelles.